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Week-end de rencontres

Week-end de rencontres

Un dernier rappel pour vous confirmer que je serai ce week-end des 28 et 29 août à Vierzon et Chanceaux-près-Loches pour y dédicacer mes deux livres, NEMESIS Remettons le monde à l’endroit et AUTOUR D’UN LIVRE Bienvenue chez Némésis

+Samedi 28 août 2021 de 14H30 à 18H30, dédicaces au magasin Hyper-U de Vierzon. 

            Adresse : 18 avenue du 19 mars 1962 18100 VIERZON

+Dimanche 29 août 2021 à partir de 8H30, dédicaces au salon des Écrivains chez Gonzague Saint Bris.

            Adresse : 37600 CHANCEAUX-PRES-LOCHES

A très bientôt,

Bertrand

Mise à jour rencontres

Mise à jour rencontres

Bonjour à toutes et à tous,

Les prochaines rencontres pour présenter mon nouvel ouvrage AUTOUR D’UN LIVRE Bienvenue chez Némésis permettront aussi de présenter à nouveau ou de dédicacer le précédent, NEMESIS Remettons le monde à l’endroit.

Au plaisir de vous rencontrer très bientôt!

+Samedi 28 août 2021 de 14H30 à 18H30, dédicaces au magasin Hyper-U de Vierzon. 

            Adresse : 18 avenue du 19 mars 1962

            18100 VIERZON

+Dimanche 29 août 2021 à partir de 8H30, dédicaces au salon des Écrivains chez Gonzague Saint Bris.

            Adresse : 37600 CHANCEAUX-PRES-LOCHES

+Mercredi 8 septembre 2021 à partir de 18H30, lecture-débat au Bistrot de l’Abbaye chez Christine et Sébastien.

Adresse : 1 rue de la Garenne18340 PLAIMPIED-GIVAUDINS

+Samedi 25 septembre 2021 de 10H00 à 12H30 puis de 15H30 à 18H30, dédicaces au magasin FNAC du Puy-en-Velay.

            Adresse : 23 boulevard Maréchal Fayolle 43000 LE PUY-EN-VELAY

+Dimanche 26 septembre 2021 de 10H00 à 18H00, dédicaces au salon du livre de Prades, Le Rocher d’écriture.

            Adresse : rue Basse 43300 PRADES

+Samedi 9 (14H00-19H00) et dimanche 10 octobre (10H00-12H00 et 14H00-19H00) 2021, dédicaces au salon du livre de Saint-Doulchard dans le Cher.

            Adresse : Domaine de Varye 18320 SAINT-DOULCHARD

+Samedi 16 octobre 2021 à partir de 15h00, dédicaces à l’Espace culturel Leclerc Auxerre.

Adresse : 14/16 avenue Jean Jaurès 89000 AUXERRE

+Samedi 30 octobre 2021 de 10H00 à 12H30, dédicaces à la librairie Marbot de Périgueux.

            Adresse : 17 boulevard Montaigne 24000 PERIGUEUX

+Samedi 30 octobre 2021 de 14H00 à 18H00, dédicaces au magasin Hyper-U de Périgueux-Boulazac.

            Adresse : Avenue Jacques Duclos 24750 BOULAZAC ISLE MANOIRE

+Samedi 13 et dimanche 14 novembre de 14H00 à 18H00, dédicaces au Salon du livre des Auteurs à Dourdan.

Adresse : Centre culturel Rue des Vergers Saint-Jacques, 91410 DOURDAN

            Ce programme est susceptible de compléments ou de changements dans les semaines à venir ; consultez de temps en temps mon blog (voir lien ci-dessous) ou le site de mon éditeur : www.editions-amalthee.com

            A bientôt,

Bertrand

Essai concluant

Essai concluant

La rencontre du samedi 3 juillet au Carré d’Art, la médiathèque de Montgeron, a réuni un petit groupe d’une dizaine de personnes pour la présentation de « AUTOUR D’UN LIVRE Bienvenue chez Némésis » selon une formule originale qui consistait, comme la plupart d’entre vous le savaient déjà, à lire une sélection de chroniques du livre et à débattre successivement du thème principal abordé dans chacune d’entre elles.

Tant sur le fond que sur la forme, il semblerait que le public présent ait apprécié l’échantillon des chroniques présentées. Quant au format, il a permis de donner du rythme à la rencontre, chaque chronique ne mobilisant pas plus de dix à quinze minutes, ce qui a permis d’aborder quatre chroniques en moins d’une heure, une cinquième ayant été lue « pour le plaisir » ! Au total, la rencontre a duré un peu plus d’une heure et quart. Il est probable qu’avec un public plus nombreux, les commentaires l’auraient été également et qu’il aurait fallu prévoir une session plus longue ou, éventuellement, de limiter les lectures à seulement trois chroniques.

Un résultat qui encourage à multiplier ce genre d’exercice permettant au public de passer un moment agréable tout en lui fournissant l’occasion de réfléchir à certains sujets, dont certains sont très lourds de conséquences sur notre vie actuelle et le seront sur celle de demain, pour nous-mêmes et pour les générations futures. 

Je vous tiendrai informés sur ce blog des prochaines rencontres de ce type…

Et je termine en renouvelant mes remerciements au public présent et bien sûr à la direction du Carré d’Art avec une mention toute particulière pour madame Caroline Ferrand.

Bertrand

Nouvelles rencontres, enfin!

Nouvelles rencontres, enfin!

Les rencontres entre auteurs et lecteurs peuvent enfin reprendre dans des conditions satisfaisantes, offrant ainsi la possibilité de découvrir de nouveaux ouvrages ou de redécouvrir des ouvrages moins récents. Pour le petit dernier, sorte d’avatar de NEMESIS, les opportunités se précisent jour après jour et il était temps de faire un premier point sur le programme des rencontres pour les semaines et mois à venir. Voici donc où et quand vous pourrez découvrir AUTOUR D’UN LIVRE Bienvenue chez Némésis au cours de dédicaces, de lectures-débats et de salons du livre :

  1. Samedi 3 juillet 2021 à partir de 15H00, lecture-débat au Carré d’Art, la médiathèque de Montgeron. Adresse : 2 rue des Bois 91230 MONTGERON
  2. Samedi 28 août 2021 de 14H30 à 18H30, dédicaces au magasin Hyper-U de Vierzon. Adresse : 18 avenue du 19 mars 1962, 18100 VIERZON
  3. Dimanche 29 août 2021 à partir de 8H30, dédicaces au salon des Écrivains chez Gonzague Saint Bris. Adresse : 37600 CHANCEAUX-PRES-LOCHES
  4. Samedi 25 septembre 2021 de 10H00 à 12H30 puis de 15H30 à 18H30, dédicaces au magasin FNAC du Puy-en-Velay. Adresse : 23 boulevard Maréchal Fayolle 43000 LE PUY-EN-VELAY
  5. Dimanche 26 août 2021 de 10H00 à 18H00, dédicaces au salon du livre de Prades, Le Rocher d’écriture. Adresse : rue Basse 43300 PRADES
  6. Samedi 9 (14H00-19H00) et dimanche 10 octobre (10H00-12H00 et 14H00-19H00) 2021, dédicaces au salon du livre de Saint-Doulchard dans le Cher. Adresse : Domaine de Varye 18320 SAINT-DOULCHARD
  7. Samedi 30 octobre 2021 de 9H30 à 12H30, dédicaces à la librairie Marbot de Périgueux. Adresse : 17 boulevard Montaigne 24000 PERIGUEUX
  8. Samedi 30 octobre 2021 de 14H00 à 18H00, dédicaces au magasin Hyper-U de Périgueux-Boulazac. Adresse : Avenue Jacques Duclos 24750 BOULAZAC ISLE MANOIRE
  9. Samedi 13 et dimanche 14 novembre de 14H00 à 18H00, dédicaces au Salon du livre des Auteurs à Dourdan. Adresse : Centre culturel Rue des Vergers Saint-Jacques, 91410 DOURDAN

            Ce programme est susceptible de compléments ou de changements dans les semaines à venir ; consultez de temps en temps mon blog ou le site de mon éditeur : www.editions-amalthee.com

            A bientôt,

Bertrand

Sous la courbe en cloche (Partie III et fin)

Sous la courbe en cloche (Partie III et fin)

Troisième et dernière partie de cette série d’articles à lire bien sûr dans l’ordre!

Sous la courbe en cloche (Partie III et fin)

En se plaçant dans une perspective historique, nous pourrions affirmer cette évidence que les sociétés ont toujours été dirigées par une minorité qui se situait le plus souvent à l’extrémité obscure de la courbe en cloche. L’humanité des XXème et XXIème siècle n’a donc pas changé. En revanche, la technologie a fait des bons de géant : dans l’armement, cela a permis à quelques va-t-en-guerre de déclencher deux conflits mondiaux, le dernier s’étant clôturé par le feu d’artifice apocalyptique de deux explosions nucléaires ; quant aux performances de plus en plus époustouflantes des circuits électroniques utilisant l’effet transistor, elles ont également permis des explosions, a priori moins dangereuses que la bombe, dans les capacités de stockage et la rapidité de traitement de l’information, le débit des systèmes de communications à distance permettant de transmettre des volumes impressionnants de données, de sons et d’images, le tout avec des circuits de plus en plus miniaturisés et d’un coût accessible à une grande partie de la population. Enfin, la technologie spatiale a permis de mettre en orbite un nombre sans cesse croissant de satellites qui apportent une multitude de services : prévisions météorologiques, systèmes de navigation d’une précision inégalée, télécommunications, observation de la Terre, etc. 

Aux plus déterminés à conquérir fortune et pouvoir, ces progrès techniques stupéfiants ont donc fourni des outils d’une puissance longtemps inimaginable et leur ont permis de dominer le monde sans avoir à mobiliser le premier GI. Un temps porté par l’industrie cinématographique et Disney, le soft power de l’Empire étatsunien a donc vu sa puissance décuplée avec les TIC et une poignée d’individus déterminés à en exploiter toutes les ressources. Comptant sur la fascination de millions de consommateurs pour la technologie qui leur était proposée, l’introduction d’équipements et de logiciels applicatifs de plus en plus sophistiqués s’est faite en douceur, insidieusement. Les « bénéficiaires » et la société en général ont réalisé bien trop tard que ces nouvelles utilisations d’une technologie en progrès constant, imaginées et mises en œuvre par quelques inconnus, allaient imposer des changements profonds dans l’organisation de la société, affectant notamment les relations humaines en les dématérialisant à outrance, privant les citoyens des relations qu’ils avaient l’habitude d’entretenir avec des personnes bien réelles pour leurs démarches administratives, leurs achats ou leurs loisirs. L’accès à la culture utilise les mêmes procédures « distancielles » que pour commander et se faire livrer à domicile n’importe quel produit qui se trouve sur les étagères des entrepôts géants d’Amazon, tandis que les cinémas et les salles de spectacles se vident peu à peu. 

Ainsi, partout dans le monde, la société s’atomise chaque jour un peu plus par la volonté d’individus qui ne se soucieront jamais de démocratie tant que leur gouvernement les laissera entièrement libres de mener leurs affaires et n’imposera pas trop lourdement leurs profits astronomiques. Diviser pour régner ! Ou atomiser pour affaiblir ! De ce point de vue, les GAFAM auront rendu un sacré service aux dictateurs de la planète, mais aussi à des dirigeants démocratiquement élus qui ne souhaitent pas trop s’embarrasser de longs débats avec les représentants de la société civile, voire avec les représentants élus de la nation ! Quant aux réseaux sociaux, ils peuvent certes permettre de rassembler un million de personnes pour signer une pétition, mais combien seront-elles pour manifester dans la rue ? Or, malgré l’impact relatif que peuvent avoir les innombrables pétitions signées chaque jour qui passe, jamais elles n’intéresseront autant les médias et n’inquiéteront autant le pouvoir que des manifestations qui rassemblent des foules nombreuses ou se poursuivent pendant des mois comme ce fut le cas avec les Gilets jaunes. En France tout particulièrement, il va sans dire que la répression féroce des manifestations et la pandémie du coronavirus qui impose des semaines de confinement n’auront fait qu’amplifier cette tendance à l’isolement des individus. 

Chacun pour soi, chacun chez soi. De toute manière, c’est vrai, on marche sur la tête, mais qu’y pouvons-nous ? « Ils » ont le pouvoir. L’autre conséquence à laquelle a certainement contribué le succès des GAFAM aura été de multiplier le nombre d’« aquabonistes » sous la partie centrale de la courbe en cloche. Là se serrent des millions d’individus résignés qui ne participent même plus à cette action minimaliste de la vie publique qui consiste de temps en temps à aller glisser un bulletin de vote dans une urne. Voilà qui ne fait que renforcer la minorité dominante qui n’aurait plus besoin pour se maintenir au pouvoir que du soutien de ceux, minoritaires également, qui se situent du même côté obscur de la courbe en cloche. 

Mais me direz-vous encore, pourquoi ceux qui se situent du côté lumineux de cette courbe ne réussissent-ils pas également à conquérir le pouvoir et à s’y maintenir ? Émettons deux hypothèses. La première pourrait être qu’ils ont une plus faible propension à vouloir exercer toute forme de pouvoir. Ils veulent le bien de l’humanité, mais attendent que cette humanité, d’un même élan, s’empare du pouvoir pour combattre les inégalités et éradiquer la pauvreté, comme tenta de le faire la Commune en 1871 ; en somme que le peuple prenne le pouvoir pour le peuple puisqu’il est a priori le mieux placé pour décider de ce qui est bon ou mauvais pour lui. Mais l’autre raison pourrait être plus importante d’un point de vue pratique : les individus qui se trouvent dans cette queue de distribution n’ont pas non plus comme objectif de se constituer des fortunes extravagantes. De ce fait, ils se privent, si l’on peut dire, de moyens essentiels pour faire connaître et partager leur idéal aux indécis, aux résignés et à tous les « aquabonistes ».

Ces hypothèses conduisent à une contradiction : pour en sortir, il faudrait d’abord avoir été du côté obscur de la courbe et, ayant amassé de gigantesques fortunes au détriment des humains et de la nature, les utiliser ensuite pour promouvoir un projet de société qui s’opposerait justement à la possibilité de constituer indûment de telles fortunes… Autrement dit, les Bill Gates, Jeff Bezos, Mark Zuckerberg et consorts devraient basculer du jour au lendemain du côté lumineux de la courbe, rachetant par exemple les plus grands médias pour faire adhérer les populations non pas au dogme ultra libéral, mais à un nouveau projet de société dans lequel la respectabilité ne serait plus attachée à la fortune et au pouvoir personnel, mais à des vertus comme l’entraide, la compassion, le don de soi et le respect dû à chaque être humain, mais aussi à la vie en général ; en somme, un parcours personnel des plus improbables chez ces milliardaires et qui évoque plutôt celui du prince Siddhartha Gautama, plus connu sous le nom de Bouddha.

Nous voilà donc rendus, au terme de ces quelques épisodes de remue-méninges, à une situation plutôt désespérante : pour l’heure, ce sont les ultra riches qui détiennent le pouvoir dans toutes ses dimensions, celle d’organiser à leur main les chaînes de production afin de maximiser leurs profits, celle d’imposer à la planète les modes de consommation qui assurent une croissance permanente de leurs chiffres d’affaires, celle de soustraire une large part de leurs profits à l’impôt, celle de continuer à détruire notre environnement et enfin, mais ce n’est pas la moindre, celle de contrôler les esprits grâce à leur mainmise sur les grands médias… 

Pour terminer malgré tout cette longue analyse par une note d’espoir, posons que si nous sommes de plus en plus nombreux à avoir compris la nature et la difficulté du problème posé, alors nous aurons fait un premier pas dans la bonne direction, celle qui permettra de trouver le bon chemin pour remettre le monde à l’endroit. Qui n’a pas entendu un jour son prof de maths déclarer qu’un problème était résolu à 50% dès lors que l’on avait parfaitement compris son énoncé ?

Fin provisoire…

Bertrand Thébault

Sous la courbe en cloche (Partie II)

Sous la courbe en cloche (Partie II)

Il est indispensable d’avoir lu d’abord la partie I avant d’entamer cette lecture.

Sous la courbe en cloche (Partie II)

Tout le monde aura compris que l’objectif de ce discours est de souligner le fait incontestable que le destin des sociétés et du monde est entre les mains de ceux qui appartiennent aux « queues de distribution » de la courbe en cloche et que leur action peut refléter des comportements qui visent deux sortes d’objectifs antagoniques : agir pour le bien ou agir pour le mal. 

Autrement dit, la marche de l’humanité ressemble à la marche d’une armée : elle ne s’oriente ni ne se dirige selon des choix faits individuellement ; ses mouvements sont guidés par quelques-uns, parfois par un seul, et la multitude est entraînée, souvent à son corps défendant, vers un destin qui sera enviable ou désastreux. Mais me direz-vous, il y a des circonstances, dans les régimes les plus démocratiques, où c’est bien la majorité qui fixe les orientations de la société ! A y regarder de plus près, dans le passé comme en ce début de XXIème siècle, il est difficile de considérer que notre mode de vie et l’organisation de la société reflètent une volonté commune, y compris dans nos démocraties, tellement elles sont imparfaites. 

Prenons par exemple les choix de développement qui ont été faits dans le monde occidental, puis dans le monde entier, depuis la fin des années 70 : celui d’une économie mondialisée qui place le commerce et la finance au-dessus de toutes les autres priorités. Existe-t-il un seul gouvernement au monde qui ait consulté, après les avoir dûment informés, ses concitoyens sur la pertinence d’un tel choix ? A ma connaissance, aucun ! Pourtant, ce choix d’une économie ultra-libérale est extrêmement lourd de conséquences pour les habitants des pays développés, avec des délocalisations d’entreprises vers des pays-usines à bas coûts qui provoquent des licenciements massifs, la précarité de nombreux travailleurs confrontés à la concurrence de millions de chômeurs, une stagnation du pouvoir d’achat, des pertes de recettes fiscales qui creusent les déficits publics et conduisent à des mesures d’austérité affectant la disponibilité et la qualité des services publics, la dégradation de l’environnement et ses effets délétères sur la santé, etc. 

Nous pourrions prendre bien d’autres exemples aussi essentiels pour la sécurité et le bien-être des populations : quelles sources d’énergie, quelle agriculture, quel système de santé, quel aménagement du territoire, quelle politique de l’environnement, quelle fiscalité faudrait-il adopter ? A deux reprises en France, il y avait bien eu un semblant de volonté de consulter le peuple sur deux sujets majeurs : le projet de traité constitutionnel européen et l’appel à une Convention citoyenne sur le climat. Tout le monde connaît la suite : le « non » au projet de traité a été jeté au panier et les propositions de la CCC ont été presque toutes ignorées, preuves s’il en fallait du manque total de respect qu’ont de nombreux dirigeants à l’égard de leurs concitoyens. 

Les évolutions constatées au cours des dix dernières années ne vont pas dans le sens d’une amélioration de nos malheureuses démocraties, bien au contraire, puisque notre mode de vie d’aujourd’hui est sournoisement organisé par quelques individus. Ils se placent à l’extrémité de la courbe de Gauss et constituent la nomenklatura de ceux qui ont tout : le pouvoir et la fortune. Ils ont tout parce qu’ils représentent cette infime minorité dont l’avidité, l’égoïsme et le besoin de dominer sont dans les gènes. Dépourvus de compassion, même s’ils la simulent parfois – et ils se font alors appeler « milliardaires philanthropes ! » – ils ont réussi en exploitant les progrès de la technologie ainsi que les potentiels naturels et humains, tout en manœuvrant pour échapper à l’impôt, à se constituer des empires oligopolistiques qui s’étendent à tous les continents et s’insinuent profondément dans notre vie privée. 

J’ai bien sûr nommé les GAFAM. Nous devons prendre conscience de cette situation sans précédent dans l’histoire du monde : une poignée d’individus, tous étatsuniens, ont réussi avec la complicité de leur gouvernement, à nous faire adopter un mode de vie qui leur aura permis d’amasser en une ou deux décennies des fortunes inouïes et de détenir beaucoup plus de pouvoir que la plupart des gouvernements de la planète ! Désormais, personne ne saurait passer à travers les mailles de plus en plus serrées de cette immense toile qui enferme la population mondiale. Pourtant, comme dans bien d’autres domaines que nous avons cités, aucun dirigeant, quelle que soit son appartenance politique ou sa zone géographique, n’a vraiment cherché à freiner l’ascension fulgurante de ces quelques individus et encore moins à consulter sa population sur les dangers que tant de pouvoir concentré en si peu de mains pouvait représenter pour la démocratie et l’indépendance des peuples. Tout au plus pouvons-nous voir certains médias fournir quelques informations sur les performances commerciales et financières de ces géants à la croissance exponentielle, et évoquer de temps à autre des préoccupations sur notre totale dépendance à leurs prestations fondées sur les technologies de l’information et de la communication (TIC). Notons incidemment que la pandémie du coronavirus n’a fait qu’accélérer cette dépendance et permis du même coup à ces entreprises de se développer encore plus vite et d’accroître encore plus leur emprise sur les populations de la planète. 

(À suivre)

Bertrand

Sous la courbe en cloche (Partie I)

Sous la courbe en cloche (Partie I)

Les trois textes postés à quelques jours d’intervalle sur ce blog s’enchaînent et portent tous le même titre « Sous la courbe en cloche » ; ils sont donc à lire dans l’ordre : Partie I, Partie II et Partie III. Le graphique montré ici aidera ceux qui ne sont pas familiarisés avec la représentation d’une distribution « gaussienne » à la compréhension des développements qui vont suivre. Cette courbe représente les valeurs constatées dans la taille des Français, hommes et femmes confondus.

Prenez un groupe de quelques centaines d’individus, mettons des hommes d’âge adulte ; l’expérience donnerait un résultat similaire avec des femmes. Passez-les un à un sous la toise et portez chaque valeur relevée sur un graphique : l’axe horizontal des abscisses représentant l’échelle des tailles, à chaque mesure, vous mettez une croix au-dessus de la taille trouvée. Peu à peu, vous allez voir se dessiner un graphique dans lequel les tailles les plus souvent trouvées se situeront par exemple autour de 1,75m. Plus vous vous éloignerez de cette valeur, moins il y aura d’individus concernés : aux deux extrêmes, à gauche et à droite de 1,75 m, il y aura très peu d’individus parmi les plus petits ou parmi les plus grands. La forme de la courbe ainsi obtenue évoque celle d’une cloche. Cette répartition statistique se retrouverait de la même manière si on avait fait passer ce groupe d’hommes sur une balance : leurs poids se répartiraient également selon cette courbe en cloche que l’on appelle plus doctement courbe de Gauss, du nom du mathématicien, physicien et astronome allemand qui en a fourni l’équation.

Au-delà des mesures physiques que nous venons d’envisager – la taille et le poids – il serait également possible de faire ce genre d’expérience sur les performances intellectuelles d’un groupe de personnes, mais cette fois sans séparer les hommes et les femmes : la mesure de leur QI donnerait également une courbe en cloche avec des valeurs variant typiquement de 55 à 145, le plus grand nombre d’individus se situant autour de 100. Soulignons le fait que les résultats expérimentaux évoqués se présentent selon une distribution d’allure gaussienne, mais ne peuvent suivre la perfection de la courbe mathématique qui comporte un nombre infini de points alors que nos échantillons se limitent à quelques centaines ou quelques milliers de mesures. 

Ces résultats illustrent la diversité des caractéristiques physiques et intellectuelles des humains, mais aussi que la distribution statistique de ces paramètres révèle une donnée constante du vivant : chaque espèce se développe autour d’une moyenne avec une dispersion de valeurs bien représentée par une courbe de Gauss. C’est pourquoi on ne trouvera pas dans les résultats d’expériences comme celles suggérées ci-dessus, par exemple un grand nombre d’individus qui mesureraient 1,25m ou 1,95m et une minorité qui mesureraient 1,75m.

Dans ces conditions, ne serions-nous pas fondés à penser que les caractères psychologiques et moraux pourraient suivre une telle loi ? 

Nous savons, grâce au chercheur italien Giacomo Rizzalatti, que le cerveau possède dans sa zone frontale des neurones dits miroirs qui permettent de s’identifier à quelqu’un d’autre et de ressentir ce qu’il ressent, autrement dit qui sont le siège de l’empathie. Cette capacité à prendre conscience de ce que vit et ressent une autre personne n’est à l’évidence pas uniformément partagée et l’on pourrait supposer que la tendance des humains à éprouver de l’empathie suive également une loi de Gauss ; sur l’axe des abscisses, nous pourrions avoir des degrés d’empathie évoluant ainsi entre des valeurs très basses et des valeurs très élevées.

L’absence quasi complète d’empathie correspondrait à une incapacité à percevoir l’état psychique et physique d’autrui, autrement dit à l’apathie la plus totale, soit un niveau d’indifférence qui s’apparenterait à certains symptômes de l’autisme ; au contraire, une empathie très développée impliquerait une identification forte et spontanée à la situation d’une autre personne. Entre ces deux extrêmes, tous les degrés de l’empathie s’organiseraient autour d’une valeur centrale, sorte d’état moyen dans lequel, sans être absente, l’empathie n’est pas spontanée : un stimulus particulier pourrait l’éveiller, par exemple la présentation d’un reportage poignant sur les conditions de vie d’une population confrontée aux malheurs de la guerre. Mais cette activation de l’empathie retomberait assez vite car les individus concernés n’ont pas de propension particulière à diriger naturellement leurs pensées vers les problèmes des autres.

La situation se complique lorsqu’il faut envisager les comportements associés à ces divers niveaux d’empathie. 

Une empathie très développée ne s’accompagne pas forcément de compassion, bien que nous ayons tendance à associer les deux phénomènes : ainsi, le sadique trouve-t-il le plus grand plaisir à commettre des crimes parce qu’il a pris pleinement conscience des douleurs qu’il inflige à ses victimes ; tandis que l’être animé de compassion recevra comme une gratification morale le fait d’avoir réussi à soulager la souffrance qu’il a ressentie chez les autres. Selon les réactions qu’elle induit, une forte empathie pourrait donc être « négative » ou « positive ». 

Quant aux individus à l’empathie « moyenne », ils pourront présenter des comportements très variés : plus faciles à manipuler, ils pourront aussi bien être entraînés sur la pente obscure de la courbe en cloche que sur la pente lumineuse, les uns basculant dans la violence ordinaire, et les autres dans l’aide aux personnes en difficultés, mais dans l’un et l’autre cas, ils n’éprouveront pas d’émotions très marquées ; ce sont des gens qui ne veulent pas d’histoires, et pour éviter d’en avoir, ils se soumettront à l’autorité et feront ce qui leur est demandé avec plus ou moins de conviction.  

Ainsi, à l’indifférence totale jusqu’à l’empathie la plus profonde, nous pourrions associer des comportements minoritaires qui peuvent s’orienter spontanément vers le mal absolu ou vers le bien le plus édifiant, tandis que l’immense majorité glissera plus ou moins, selon les circonstances et le rôle exercé par la minorité la plus influente, soit vers le côté obscur, soit vers le côté lumineux de l’humanité. Là encore, nous pourrons sans aucun doute retrouver une distribution gaussienne de tous ces comportements, du plus odieux au plus admirable. L’Histoire nous montre cependant qu’en cas de crise majeure – guerre, révolution, famine… – la minorité « agissante » a su, plus souvent qu’il n’aurait fallu, entraîner une partie de la majorité « silencieuse » dans des aventures tragiques : massacres, génocide, guerre, dictature, collaboration avec l’ennemi, tandis que les exemples opposés ont été beaucoup plus rares quand ils ont conduit à plus de liberté, plus de démocratie, plus de respect des droits humains avec des figures comme celles du Mahatma Gandhi, de Nelson Mandela, de Martin Luther King ou encore des résistants contre la barbarie nazie. 

(À suivre)

Bertrand

Vous avez bien dit « bonus »?

Vous avez bien dit « bonus »?

Dans une chronique en date du 25 janvier dernier, j’avais promis de revenir sur ce terme de « bonus » employé par le Professeur Lescure, infectiologue à l’hôpital Bichat, pour désigner les années de vie dont un humain pouvait bénéficier au-delà de ses 80 ans. Je souhaite en effet réagir spécifiquement sur cette conception tout aussi étrange que choquante qui sous-entend que la vie n’aurait plus beaucoup d’utilité ou de sens passé un certain âge, et au-delà duquel il ne serait donc pas bien grave de mourir. 

Je ne vais pas reprendre l’argumentaire de ma précédente chronique dans laquelle je m’appuyais sur le serment d’Hippocrate pour contester que les « choix très difficiles » dans la prise en charge de patients pouvaient être également fondés, en dehors d’un choix strictement médical, sur un déficit de moyens humains et matériels, un tel déficit étant lui-même contestable dès lors que l’on se situe dans un pays très riche comme la France.

Dans la discussion qui va suivre, il s’agira donc uniquement de montrer en quoi la notion de « supplément de vie », autrement dit de « bonus », est inacceptable d’un point de vue éthique. 

Chaque instant de notre vie, aussi longtemps que nous sommes en possession de nos capacités mentales, est inestimable car il est un instant de notre présence au monde et de notre conscience d’exister. Sa valeur infinie tient à ce que chaque instant est prélevé sur un potentiel de temps qui est au contraire non seulement fini, mais dont la finitude est d’amplitude inconnue et quasi imprévisible. Au fond, cette valeur tient de la relation que marchands et acheteurs connaissent bien, celle de l’offre et de la demande. D’un côté, l’offre incertaine et bornée du temps de vie ; de l’autre, une demande infinie puisque dans leur immense majorité, les humains aspirent à l’éternité ; voilà la raison qui leur a fait inventer des dieux et des religions afin de nourrir leurs chimères de vie éternelle dans un autre monde dont personne n’a jamais pu imaginer à quoi il pourrait bien ressembler sans tomber dans les plus folles extravagances.

La valeur de la vie ne devrait donc pas se mesurer en fonction de critères que la société est souvent tentée de mettre en avant, comme l’utilité qui peut être attribuée à chacun en fonction de sa capacité à produire tel ou tel type de richesse, autrement dit une vision purement mercantile de la vie. Pour le négrier, ce qui faisait la valeur de la vie d’un esclave, c’était d’abord sa force physique et la quantité de travail qu’il pouvait fournir. L’utilité qu’ils avaient pour leur maître, voilà à quelle aune était mesurée le prix de la vie de ces malheureux. Aujourd’hui, un employeur perçoit de la même manière la « valeur » de son employé à sa capacité de création d’une richesse monnayable. C’est pourquoi cet employeur aurait par exemple intérêt à ce que la santé physique et mentale de son employé soit préservée au mieux afin qu’il conserve une productivité élevée ; malheureusement, cette préoccupation n’est pas toujours présente dès lors que le remplacement de cet employé peut être effectué presque instantanément dans une situation qui correspond à un « marché » de l’emploi déséquilibré où l’offre de main-d’œuvre est bien supérieure à la demande, autrement dit dans une situation de chômage élevé. 

Mais que devient la valeur d’un individu qui se retire volontairement des circuits de la production marchande et du travail rémunéré, périphrase pour exprimer qu’il part à la retraite ? Sa vie passe-t-elle brutalement à une valeur quasi nulle, et même négative si l’on adopte le point de vue de ceux qui pensent que ces personnes-là sont à la charge de la société ? 

Inutile de poursuivre ce type de raisonnement et ces questionnements qui accordent à la vie une valeur relative et non une valeur absolue, ce qui pourrait évidemment conduire à euthanasier tous les humains dès lors qu’ils sont entrés dans ce que l’on appelle de manière inepte le monde des « inactifs » ! Il est évident que la valeur d’une vie ne saurait dépendre d’aucun facteur externe à l’individu et de son mode d’interaction avec la société. Ce qui veut dire que personne ni aucune sorte d’instance n’est en droit de décider qui est « important » ou qui ne l’est pas. Seul l’individu est capable de percevoir le prix qu’il accorde à sa propre vie, et s’il est confronté à un danger telle qu’une agression, il fera tout pour la sauver et en dernier lieu pour la « vendre chèrement » si la situation lui fait courir un risque très élevé de la perdre.

Mais pourquoi sommes-nous en général aussi attachés à notre vie ? 

L’instinct de conservation est la première réponse qui vient à l’esprit ; c’est en quelque sorte un principe vital inné érigé comme première ligne de défense d’un individu et de son espèce contre ce qui en menace l’existence même. Nul besoin de se livrer à une réflexion philosophique approfondie pour examiner ce caractère qui existe chez tous les êtres vivants, de la fourmi à l’éléphant en passant par les humains. Toutefois, à la différence des animaux, il peut arriver que certains humains voient leur instinct de conservation mis à mal dans des circonstances très particulières : le prisonnier soumis à la torture peut voir la mort comme une délivrance au même titre que le patient dont la maladie lui fait endurer des douleurs insupportables ; l’individu enfermé dans le désespoir parce qu’il ne voit plus aucun sens à sa vie et que le mauvais sort s’acharne contre lui ; ou encore celui qui est rongé par le remords après avoir accompli une action particulièrement grave et odieuse, ce qui peut le conduire au suicide. A côté de ces souffrances physiques ou morales, l’altération de l’instinct de conservation peut prendre des visages moins tragiques, mais néanmoins délétères à terme pour la personne concernée : il s’agit de comportements délibérés généralement liés à des addictions comme la consommation excessive de tabac, d’alcool ou d’autres drogues, mais aussi d’une mauvaise hygiène de vie au niveau de la nourriture et d’une activité physique insuffisante. Citons enfin l’imprudence et le choix d’activités à risques élevés telles que la conduite d’une moto et la pratique des sports mécaniques, du vol en parapente, de l’alpinisme, et de bien d’autres activités de ce genre qui offrent un attrait plus fort que la crainte de l’accident grave. En fait, chaque individu met constamment en balance son besoin naturel de sauvegarder son intégrité physique avec la satisfaction de ses désirs et de ses pulsions.

Cependant, les humains étant des êtres complexes et doués de conscience, leur besoin de vivre peut reposer sur d’autres finalités que le pur instinct de conservation qu’ils partagent avec les animaux, du fait que l’être humain est à la fois acteur et spectateur du monde dans lequel il se trouve immergé. 

Acteur de sa propre vie, il est aussi en interaction constante avec celle des autres, pour le meilleur et pour le pire. Ainsi, son engagement dans des activités qui lui permettent de donner du sens à sa vie nourrira chez lui le désir de les poursuivre aussi longtemps que possible et quelque fois jusqu’à son dernier souffle ; il en va ainsi très souvent pour ceux qui œuvrent dans les vastes domaines des arts, de la politique et de toutes sortes d’activités militantes et associatives. Ce désir de vivre encore et encore est souvent lié à un autre désir, celui de voir achevée une œuvre à laquelle il a consacré beaucoup de temps et d’énergie. Combien de constructeurs de cathédrales ont dû songer avec amertume qu’ils ne vivraient pas assez longtemps pour voir l’achèvement du monument auquel ils auront consacré une vie de labeur ? Combien de desseins auxquels des êtres humains ont voué tous leurs efforts, mais dont la réalisation reste à la fois lointaine et incertaine ? Nous sommes-là dans un registre qui est bien éloigné du désir de vivre guidé par le simple instinct de conservation.

            Nous sommes aussi spectateurs du monde, et le spectacle qu’il nous offre est fascinant à bien des égards. Sa diversité et sa complexité naturelles, ou son caractère à la fois infiniment grand et infiniment petit, tout cela suffirait à exciter notre curiosité et à occuper tout notre temps pour ne la satisfaire que très partiellement. Mais les humains sont venus ajouter une autre complexité en créant leur propre monde par-dessus celui de la nature ; et la complexité naturelle venant interagir avec celle des humains, la résultante dépasse encore plus tout ce qu’un humain peut embrasser. De ce point de vue, nous sommes sans conteste la planète la plus compliquée à étudier parmi les astres qui nous sont connus, non seulement à cause de la présence de la vie à la surface de la Terre, mais de cette vie si particulière qu’est celle des humains. Au-delà du désir d’observer et de comprendre l’univers dans lequel nous vivons, celui d’en découvrir les changements qui vont se produire dans le futur nous place dans une situation comparable au spectateur d’une pièce de théâtre : il n’a pas du tout envie que la représentation s’interrompe avant la fin, car il est bien sûr avide de connaître le dénouement de l’histoire.    

Voilà donc pourquoi, à défaut de rester acteurs, nous avons envie de rester spectateurs aussi longtemps que possible, car comme le disait Shakespeare dans son célèbre poème, All the world’s a stage, le monde entier est un théâtre ! Un théâtre particulier dans lequel les représentations se renouvellent au jour le jour, avec d’innombrables rebondissements, parfois drôles, le plus souvent tragiques. 

Alors que nous ayons 80 ans, ou plus, ou moins, cela ne change rien à la condition humaine : chacun d’entre nous à de multiples rôles à jouer dans le spectacle permanent que nous offre le monde ou d’y assister en simple spectateur ; nous en étions hier, nous en sommes aujourd’hui et nous avons une folle envie d’en être encore demain même si nous n’avons que les seconds rôles ou sommes mal placés dans le poulailler du théâtre ! Ce sont là des raisons de désirer que la vie continue qui nous situent au sommet de la structure du vivant et vont bien au-delà de l’instinct de conservation primaire.

Cette histoire de « bonus », quelle idée bizarre !

Bertrand    

Les très gros avions ont-ils un avenir?

Les très gros avions ont-ils un avenir?

Je vous livre aujourd’hui deux chroniques écrites en juin 2020 mais qui n’ont pas été publiées dans AUTOUR D’UN LIVRE pour ne pas donner à la question du transport aérien une importance démesurée par rapport aux autres sujets abordés dans le livre publié le 23 décembre 2020, ce livre comportant déjà au moins deux chroniques sur les problèmes que soulève ce mode de transport.

Adieu l’A380 ?

France Inter annonçait dans sa matinale du vendredi 19 juin 2020 que les éléments du dernier géant de l’air à être assemblé à Toulouse avaient été acheminés par la route au cours de la nuit. L’événement pouvait être ressenti comme une sorte de convoi funèbre symbolisant la fin d’un prestigieux programme qui avait vu l’A380 prendre l’air 15 ans plus tôt, le 27 avril 2005. Aucun avion de ligne n’aura connu une si courte carrière. Et pourtant ce projet avait été conçu pour absorber la croissance du trafic aérien sur les lignes dites à haute densité entre des paires d’aéroports pouvant drainer des dizaines de millions de passagers, grâce notamment au système de plateforme de correspondance (« hub and spokes » en anglais) qui consiste à préacheminer par des lignes secondaires régionales des passagers devant embarquer sur des vols intercontinentaux.

L’idée de remplacer des modules de taille moyenne par de très gros modules avait été envisagée dès la fin des années 80, un gros module étant plus économique à exploiter que deux ou trois plus petits. Air Inter fut ainsi compagnie de lancement de l’A330 et commença à l’exploiter en 1994 dans une version mono classe de 417 sièges sur les lignes entre Paris et les grandes villes de province.

C’est alors que fut mise en œuvre l’ouverture du ciel européen à la concurrence, ce qui provoqua très rapidement l’arrivée de nouveaux venus sur les lignes à fort trafic devant être desservies avec les A330 de la compagnie Air Inter. Cette dernière tenta bien de contrer la politique de prix agressive de ses concurrents qui utilisaient des petits modules de technologie plus ancienne, mais cela ne suffira pas : Air Inter ne prendra livraison que de 4 avions sur les 15 qui avaient été commandés. Ce seront alors les A320, modules de 150 sièges, qui prendront le relais des commandes annulées d’A330.

Les conséquences de cette libéralisation du transport aérien seront multiples : augmentation du trafic consécutive à une baisse des prix et à une offre plus abondante ; multiplication des fréquences provoquant la saturation des aéroports et l’augmentation des nuisances sonores; construction de nouveaux terminaux aéroportuaires ; et assez rapidement, consolidation du secteur : les concurrents d’Air Inter apparus au début des années 90 finiront par disparaître, Air Inter étant elle-même absorbée par Air France.

Fondamentalement, les raisons qui poussent les compagnies aériennes à se détourner de l’A380 ne sont pas très différentes de celles qui avaient jadis poussé Air Inter à abandonner ses nouveaux A330 : la concurrence exacerbée liée à la libéralisation du transport aérien qui incite les compagnies à multiplier l’offre de fréquences sur les lignes intercontinentales et à mettre en ligne des avions de 400 sièges au lieu des 600 à 800 que permet l’A380. Jusqu’à l’arrivée du Covid 19, les conséquences étaient les mêmes que 30 ans plus tôt, avec de surcroît une préoccupation environnementale devenue incontournable. Autrement dit, la fin annoncée du programme A380 n’a bien sûr aucun rapport avec la crise profonde du transport aérien provoquée par la pandémie : elle correspond à une politique de concurrence débridée qui sévit dans d’autres secteurs, mais qui rend le transport aérien particulièrement vulnérable compte tenu des taux de rentabilité faméliques de ce secteur.

Bien évidemment, cette politique très libérale a également provoqué de nouveaux comportements chez les usagers du transport aérien. Devant une offre d’horaires aussi importante, les passagers, qu’ils voyagent pour raison professionnelle ou d’agrément, ont tendance, sur les lignes à fort trafic, à choisir d’abord leurs dates de voyage et à regarder ensuite l’horaire qui sera le plus raccord avec leur projet. Par le passé, on regardait d’abord quelle était l’offre de vols pour ce genre de lignes, puis on planifiait son déplacement en fonction de cette offre, ce que l’on continue d’ailleurs à faire sur les lignes à faible trafic où l’offre est forcément limitée.

A ce stade du raisonnement, il faut signaler que le coût au passager-kilomètre transporté (PKT) est d’autant plus faible, à technologie et taux de remplissage équivalents, que la capacité de l’avion est élevée : il est plus économique, encore une fois, toutes choses égales par ailleurs, d’exploiter un avion de 600 sièges qu’un avion de 300 sièges. Concrètement, si l’on diminuait aujourd’hui par deux l’offre de fréquences sur les lignes à haute densité, la flotte actuelle d’A380 ne suffirait pas à absorber ce transfert de trafic et le programme aurait encore de belles années devant lui, avec pour conséquence une diminution des nuisances sonores et des émissions de GES, moins de congestion aéroportuaire et une moindre nécessité de construire de nouveaux terminaux. Les passagers seraient alors invités à voyager différemment : moins souvent, avec des séjours plus longs et plus planifiés en fonction des horaires de vols.

Le très gros problème qui resterait à résoudre est de nature politique puisqu’il reviendrait à un changement de cap radical avec le retour à des droits de trafic plus réduits en nombre de fréquences sur les liaisons à fort trafic, ce qui conduirait à mettre en ligne de très gros porteurs au lieu d’avions comme l’A350 ou le B787. Cette orientation va à l’encontre des tendances, au moins d’avant Covid, qui visaient au contraire à l’augmentation constante des fréquences : ainsi, les gouvernements français et chinois ont-ils conclu de nouveaux accords en 2017 qui prévoient la possibilité d’augmenter de 100 à 252 par semaine le nombre de vols entre les deux pays à partir de 2020 ! Cet accord prend bien sûr un relief tout particulier dans le contexte de la pandémie, mais aussi par rapport à la prise de conscience environnementale qui semble s’être accentuée au cours de la période de confinement.

Alors, faut-il vraiment enterrer le programme A380 ou au contraire engager le développement d’une version avec des moteurs encore plus économiques, repenser l’économie du transport aérien en limitant les fréquences de vol pour réduire les nuisances sonores et les besoins d’extensions aéroportuaires, enfin amener les passagers à voyager « autrement » et sans doute moins souvent pour certains ? La recherche d’un difficile compromis entre maintien de nombreux emplois et réduction des GES et nuisances sonores dans l’industrie du transport aérien est plus que jamais à l’ordre du jour.    

A380 versus A350

J’aimerais réagir à propos de la comparaison que fait un journaliste australien, Nicholas Cummins, entre l’A380 et l’A350 avec un article daté du 25 mars 2919 dans simpleflying.com. Il donne l’A350 vainqueur. Mais est-il pertinent de comparer comme il le fait deux objets aussi différents ? Et surtout de se limiter à des paramètres certes importants, mais loin d’être suffisants. De plus, s’agissant de la rentabilité de chaque appareil, il conviendrait en fin d’examen de conjuguer l’ensemble des coûts pour en déduire un coût total d’exploitation (Total Operating Cost), ce qu’il ne fait pas.

Concernant le montant des investissements, il est bien sûr absurde de comparer le prix d’achat des deux avions : dans les prix que donne N. Cummins, on constate que l’A380 coûte 80 M$ de plus que l’A350. Encore heureux, puisque le premier transporte deux fois plus de passagers ; à cette aune, on pourrait plutôt conclure que l’A380 est très largement vainqueur car ramené au siège offert, mettons 700 contre 350, un siège du géant « ne coûte que » 635 700 $ contre plus d’un million de $ pour son petit frère ! Il faut noter en passant que N. Cummins donne des prix publics qui sont 40 à 60% plus élevés que ceux réellement négociés par les compagnies aériennes.

Sur la technologie, compte tenu que les dates du premier vol des deux avions sont séparées de plus de 8 ans, on aurait pu s’attendre à un avantage plus net de l’A350 : hormis des améliorations très marginales sur le confort des passagers, seul le moindre bruit des moteurs est mis en avant, alors que les passagers qui ont volé sur l’A380 sont unanimes pour louer le silence de cet avion, y compris au décollage. J’ajoute de mon côté, le plus lourd bénéficiant d’une plus grande inertie, que l’A380 amortit mieux les turbulences et rend donc le vol moins inconfortable dans ce genre de situation.

Pour ce qui est de l’autonomie et du cargo, il n’y a là rien de spectaculaire en faveur de l’A350.

Au total, comme déjà indiqué, le résultat essentiel auquel on aurait dû aboutir n’est pas fourni et n’a sans doute pas été établi par l’auteur de l’article, à savoir le coût total d’exploitation. Il serait très surprenant, toutes choses égales par ailleurs (technologie et taux de remplissage essentiellement) que la comparaison complète et rigoureuse entre les deux modules ne confirme pas la règle générale qui veut que plus un avion peut emporter de passagers, plus il est économique au siège-kilomètre offert (SKO).

Cela dit, la question qui se pose aujourd’hui n’est pas de savoir si Airbus est capable d’améliorer encore les performances de son très gros porteur, ni de contester l’excellence de l’A350 dans sa catégorie. La question est de savoir si le monde du transport aérien, qui est en train de vivre l’enfer du Covid 19 tout en devant affronter le défi climatique, ne doit pas faire son aggiornamento en abandonnant la stratégie de l’offre fondée sur la multiplicité des fréquences sur les lignes à haut débit et du point à point (vols direct) sur un grand nombre de lignes intercontinentales à faible débit. L’objectif de réduire drastiquement l’empreinte environnementale du transport aérien implique de revenir au concept d’aéroport pivot (hub) alimentés par des lignes secondaires et des transports de surface comme les trains à grande vitesse, de manière à pouvoir assurer de bons taux de remplissage dans des modules de grande capacité sur des lignes intercontinentales à haut débit. Cela augmentera sans doute certains temps de parcours actuellement en point à point, mais les économies d’énergie ne peuvent échapper aux lois de la physique : la vitesse et la facture énergétique évoluent toujours dans le même sens. Dans le même souci de réduction des GES, les turbopropulseurs, un peu moins rapides, mais surtout moins gourmands en carburant, devront peut-être supplanter les turboréacteurs sur de nombreuses lignes d’apport.

Les habitants de cette planète, notamment ceux des pays développés, devront apprendre, et pour les plus âgés réapprendre, à voyager plus lentement, voire moins souvent, pour ralentir le réchauffement de la marmite terrestre. Le transport aérien devra donc s’adapter, et ce n’est sûrement pas en abandonnant un programme comme celui de l’A380 que nous irons dans la bonne direction.

Les « aquoibonistes »

Les « aquoibonistes »

C’était un dimanche matin, le 15 décembre 2019; France Inter était en grève et diffusait son programme musical que j’écoutais distraitement en prenant mon petit déjeuner quand mon attention fut attirée par la voix de Jane Birkin qui chantait les Aquoibonistes. Les « à quoi bon » de cette ballade légère me ramenèrent vingt-quatre heures en arrière où je me trouvais à Brétigny sur Orge au salon du Livre et du Jeu, essayant d’amener les visiteurs à s’intéresser aux questions qu’aborde mon essai au titre et au sous-titre évocateurs puisque le premier est NEMESIS, la redoutable déesse du panthéon grec chargée de juger et punir les humains qui vivent dans le luxe ostentatoire, tandis que le second propose rien de moins que : Remettons le monde à l’endroit. L’objectif du sous-titre est évidemment ambitieux et mes interlocuteurs de passage sont nombreux à le faire remarquer sur un ton souvent désabusé. Malgré mon insistance à leur expliquer que le monde change constamment, que rien n’est figé et qu’il dépend aussi de chacun d’entre nous qu’il évolue dans un sens qui apporte plus de bien-être à tous, la réaction est souvent celle résignée d’un « aquoiboniste » : à quoi bon se battre, nous n’y pouvons rien, « ils » feront ce qu’« ils » veulent… A tous les « aquoibonistes » je voudrais encore rappeler cette pensée de Martin Luther King citée dans mon livre : « Un individu n’a pas commencé à vivre tant qu’il n’est pas parvenu à s’élever au-dessus de l’horizon de ses problèmes personnels jusqu’à la hauteur des problèmes plus larges de l’humanité tout entière ».