Réagir!

Comment en effet ne pas réagir en ce sombre lundi du 20 juin 2022 au désastre électoral de la veille qui a vu l’extrême-droite accéder en nombre à l’Assemblée nationale pour la plus grande honte de la France pourtant reconnue dans le monde entier comme l’initiatrice de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen ?  A cette honte s’ajoute notre abattement devant la démocratie en lambeaux avec un taux d’abstention estimé à 54% au second tour des législatives alors que l’enjeu de ce scrutin était d’une importance capitale pour l’avenir de notre pays, sa protection sociale, l’environnement, la réduction des inégalités et le renouvellement de la démocratie. Mais c’est aussi un profond désespoir qui envahit les citoyens de ma génération de baby-boomers lorsque cette abstention concerne la partie de la population sur laquelle devraient se fonder tous nos espoirs : la jeunesse ! La jeunesse aux abonnés absents des isoloirs risque de payer très cher et très vite son inaction citoyenne qui revient à laisser aux plus âgés et aux plus égoïstes la responsabilité de poursuivre la destruction largement engagée de notre environnement et de notre modèle social. Et pour aggraver encore ce désastreux constat, les forces ultra-libérales les plus conservatrices risquent de faire alliance pour faire voter des lois fiscales qui vont encore aggraver les inégalités de revenus et de capital, des lois antisociales qui vont accroître les écarts d’espérance de vie entre ceux qui ne sont « rien » et les plus favorisés du fait de nouveaux reports de l’âge de départ à la retraite et de conditions de travail plus dures encore soumises aux exigences des marchands et des actionnaires, de lois écocides autorisant la poursuite de l’utilisation d’intrants toxiques dans l’agriculture ou de plans de développement de nos énergies prévoyant de couvrir notre territoire de nouveaux sites nucléaires qui sont autant d’épées de Damoclès au-dessus de nos têtes…

Des occasions de « remettre le monde à l’endroit » comme celle que les Français viennent de laisser passer une nouvelle fois, il ne s’en présente que tous les cinq ans. Pendant ce temps-là, combien de millions d’entre nous devront continuer à vivre dans la pauvreté ou la précarité, qu’ils soient chômeurs ou « travailleurs pauvres », combien de centaines de milliers d’étudiants obligés de chercher des petits boulots pour payer leurs études, combien de lits d’hôpitaux encore fermés, combien de nouveaux accords de libre-échange encore passés en catimini, aggravant la folle intensité des transports de marchandises et la vulnérabilité de nos approvisionnements, etc. ? 

Mais que faire quand la partie de la population qui devrait être porteuse d’espoir nous conduit au contraire à désespérer ?

Surtout, ne pas se résigner ! 

Continuer à expliquer avec obstination les mécanismes mortifères qui sont à l’œuvre dans notre société, à sensibiliser nos jeunes aux réalités de ce monde qui marche sur la tête, à militer dans toute la mesure du possible et à garder espoir…

Bertrand