Skip to main content

L’art et le luxe des milliardaires

L’art et le luxe des milliardaires

Deux amis m’ont vanté la réussite architecturale et muséale que constitue la reconversion en musée de l’ancienne Bourse de Commerce, opération financée par François Pinault. Je veux bien reconnaître moi-même la qualité de cette transformation, même si la créativité des architectes qui ont conçu ce Colisée miniature à la fin du 18ème siècle a beaucoup contribué au succès des équipes mobilisées par le milliardaire… 

Quant à la transformation de La Samaritaine financée par un autre milliardaire, Bernard Arnault, elle aussi reprend les éléments de ses talentueux concepteurs, les architectes Frantz Jourdain et Henri Sauvage, qui avaient œuvré à la construction, à la réhabilitation ou à l’agrandissement des différents corps de bâtiments de ce qui fut le plus grand magasin de Paris jusqu’au début des années 1970. Ce nouveau « must » parisien est avant tout destiné à une clientèle ayant les moyens de s’offrir les produits de luxe qui y sont proposés ou un séjour dans l’hôtel cinq étoiles qui le jouxte. 

Mais avant de vous faire part plus longuement des réflexions que m’inspirent ces aménagements récents, il me semble intéressant de rappeler comment ces lieux historiques ont fait leur apparition. 

**

Dans l’ordre chronologique, c’est l’histoire de la Bourse de Commerce qu’il faut évoquer en premier. L’emplacement du bâtiment actuel avait été occupé par une résidence royale construite à la demande de Catherine de Médicis à partir de 1572 et peu à peu agrandie pour devenir en 1578 la Résidence de la Reine avec son vaste jardin et sa colonne astronomique cannelée, dite Colonne Médicis, achevée en 1574 et qui a réussi à traverser les siècles jusqu’à nos jours. De successions en successions, la résidence royale sera rebaptisée Hôtel de Soissons suite à son acquisition par Charles de Bourbon comte de Soissons.

En 1720, son propriétaire d’alors, Victor Amédée de Savoie, y établit la Bourse de Paris dans les jardins de l’hôtel. Ruiné par la banqueroute de Law, il dût se résoudre à vendre l’ensemble immobilier à la prévôté de Paris en 1740. Celle-ci détruisit les bâtiments et construisit à la place la Halle au Blé en 1760.

La Halle au Blé avait déjà une forme circulaire avec sa grande galerie voûtée au premier étage où était stocké le grain et à laquelle on accédait par un escalier tournant à double révolution, ce qui évitait aux acheteurs de croiser les portefaix transportant les sacs de grain. En 1802, le feu détruisit la remarquable coupole dont l’ossature était en bois et qui avait été ajoutée à l’édifice pour en couvrir la cour intérieure. Une coupole en fonte et cuivre fut alors reconstruite.

Les mécanismes qui étaient en ce temps mis en œuvre pour acheter et vendre ressemblaient fort peu à ceux que l’on connaît aujourd’hui, à une exception près : le prix des marchandises dépendait bien sûr de l’offre et de la demande ! La Halle au blé était à la fois un entrepôt de céréales et un lieu où vendeurs et acheteurs se rencontraient pour négocier des prix et des quantités. Tel jour, le prix du blé s’établissait donc à un certain cours fonction à la fois du volume et de la qualité de la céréale proposée, mais aussi de la demande qui s’était manifestée.

Dotée d’une nouvelle coupole en fonte couverte de cuivre puis de verre, la Halle au blé eût à subir un nouvel incendie en 1854, puis fut fermée en 1873. La Chambre de Commerce de Paris se vit attribuer le bâtiment en 1885 et y transféra la Bourse de Commerce depuis le palais Brongniart. Dès lors, les marchandises objet de contrats négociés entre vendeurs et acheteurs n’étaient plus présentes dans l’édifice, d’autant qu’il s’agissait le plus souvent de marchés à terme, autrement dit de contrats sur des marchandises qui ne seraient disponibles qu’à une date ultérieure, à des conditions convenues au moment de la transaction, par opposition aux marchés au comptant. 

Puis en 1949, la Ville de Paris vendit l’édifice pour le franc symbolique à la Chambre de Commerce.

L’évolution des technologies introduisit progressivement des procédures de transactions utilisant des outils informatiques pour les marchés à terme qui se négocient maintenant par le marché électronique au sein d’Euronext. A partir de 1998 le bâtiment a donc perdu son rôle initial pour être dédié à des activités proposées par la CCI (Chambre de Commerce et d’Industrie) de Paris avec notamment des services aux entreprises.

En 2016, le bâtiment qui, rappelons-le, avait été cédé pour le franc symbolique par la Ville de Paris à la Chambre de Commerce en 1949, est racheté par cette même Ville de Paris pour la modique somme de 86M€ tout en confiant aussitôt sa gestion à François Pinault, entrepreneur milliardaire de son état, mais aussi devenu grand amateur d’art grâce à sa seconde épouse, antiquaire à Rennes, qui l’initiera au monde de l’art à partir de 1970. 

Il est donc intéressant de s’attarder quelques instants sur le parcours de F. Pinault.

Né en 1936 près de Dinan dans les Côtes d’Armor, il n’a pas commencé la vie dans les conditions difficiles que pouvaient rencontrer à cette époque la plupart des jeunes qui voulaient poursuivre des études leur permettant de décrocher un diplôme de bon niveau et d’accéder ainsi à une position sociale élevée. Son père, marchand de bois et propriétaire d’une petite scierie, l’enverra faire ses études secondaires à Rennes. Le père de sa première épouse l’était également, ce qui permettra à François Pinault de créer en 1962 sa première entreprise de négoce dans ce secteur dès l’âge de 26 ans en rachetant l’entreprise de son beau-père avec l’aide du Crédit Lyonnais qui sera son partenaire stratégique (« son client » disait-il !) pendant des décennies. En quelques années, les établissements Pinault vont traiter de très gros volumes de bois d’œuvre, important par exemple 35000m3 de sapin d’Europe du nord en 1969.

Puis son sens des affaires va ensuite lui permettre de franchir une marche significative vers les sommets de la fortune : en 1973, le Crédit Lyonnais le pousse à vendre les établissements Pinault à un groupe britannique pour 25MF. Il investit alors une somme relativement modique de 300KF dans le sucre à … la Bourse de Commerce. Un an plus tard, le cours du sucre ayant explosé, il revend son placement pour 100MF et rachète au groupe britannique son ancienne entreprise en sérieuses difficultés pour seulement 10MF. 

Dans les années qui vont suivre, François Pinault continuera à racheter des dizaines de sociétés en difficultés, construisant ainsi peu à peu son empire. Ces opérations sont souvent douloureuses pour les employés des entreprises concernées. Par ailleurs, des fonds publics importants viennent opportunément faciliter la stratégie de conquêtes du futur milliardaire. Ainsi en va-t-il de l’entreprise Isoroy, spécialisée dans la production de panneaux de bois, rachetée pour le franc symbolique en 1986, mais dans laquelle François Pinault supprime le quart des effectifs (1000 sur 4000) et investit 400MF dont 130MF provenant de subventions publiques. Il revendra l’entreprise en 1992. L’épisode de Chapelle Darblay n’est guère plus glorieux au plan de l’éthique : en 1987, ce producteur de papier journal, dans lequel l’État a injecté un total de 2,3 milliards de francs pendant six ans, est racheté par François Pinault grâce à un prêt de 300MF du Crédit Lyonnais. Dès 1990, l’entreprise est revendue pour 1,4 milliard de francs avec une plus-value de 435MF ! Mais ces opérations se trouvent également facilitées par les relations privilégiées qu’entretient ce « grand patron » avec le pouvoir politique, l’opération de la reprise de Chapelle Darblay ayant par exemple été soutenue par Jacques Chirac et Alain Madelin (François Pinault a hébergé le couple Chirac jusqu’au décès de l’ancien Président dans son hôtel particulier de la rue de Tournon à Paris ; Madame Chirac y habite encore à ce jour). 

Puis une stratégie de diversification va s’installer, notamment, mais pas seulement, sous forme d’acquisitions et d’investissements dans la distribution et le luxe à partir des années 90. Après le rachat en 1991 de Conforama à son meilleur ennemi, Bernard Arnault, ce sera le Printemps en 1992 ; Pinault SA devient alors Pinault-Printemps. Mais la boulimie de François Pinault ne s’arrête pas là et il acquiert en 1994 La Redoute qui viendra rejoindre le Printemps dans le groupe Pinault-Printemps-Redoute (PPR). A la fin des années 90, sa société Artemis procède à des acquisitions ou prend des participations tous azimuts : FNAC, Le Point, Christie’s (pour 1,2 milliard d’euros), l’Agefi, Bouygues, le Stade rennais FC. Enfin, et ce sera l’apothéose de la saga Pinault père, l’année 1999 voit une entrée fracassante dans l’industrie du luxe avec l’acquisition de Sanofi Beauté qui possède Yves Saint Laurent et une prise de participation de 40% dans Gucci, tout cela en moins de 24 heures ! Suivront Bottega Veneta, Boucheron, Alexander McQueen, toutes ces entreprises étant désormais regroupées dans Kerig, la holding qui a remplacé PPR et dont la capitalisation boursière atteignait fin 2019 73,8 milliards d’euros, dont 41,4% contrôlés par François Pinault au travers d’Artémis. Selon Business Insider, la fortune de la famille Pinault s’élevait à 37,8 milliards d’euros en octobre 2020, ce qui la placerait au 3ème rang français, biens personnels inclus. Mais comme pour la plupart des membres du CAC40, la pandémie du COVID 19, loin de réduire les profits et le patrimoine du groupe Pinault les a au contraire augmentés ; ainsi peut-on constater que la valorisation boursière de Kering était de 80,8 milliards d’euros au 22 octobre 2021, soit une progression de 7 milliards d’euros en moins de deux ans, une évolution guère surprenante pour une entreprise qui commercialise des produits de luxe et qui a donc pour clientèle les plus nantis d’entre nous tandis « qu’en même temps » les queues devant les Restos du Cœur, le Secours populaire ou le Secours catholique sont de plus en plus longues. 

Tout ce qui précède représente le parcours de l’homme d’affaires. Mais celui de l’amateur d’art ou de grands crus mérite également le détour. Lorsque l’on possède un tel patrimoine et qu’une grande banque ne vous refuse rien ou presque, alors il devient facile de se consacrer à des passe-temps de milliardaires comme ces achats de vignobles dans le Bordelais, en Bourgogne et dans la vallée du Rhône, mais bien plus encore à acquérir à grands frais des œuvres d’art ou jouer les mécènes au profit de jeunes pousses dans le milieu de la peinture ou de la sculpture, tout cela avec une forte propension à s’intéresser à l’art moderne et à l’art contemporain. Grand bien lui fasse ! Mais François Pinault a tellement accumulé d’œuvres au fil des décennies qu’il lui fallait mobiliser des locaux à la mesure de ses collections pour les conserver et les accrocher. 

En 2000, une première tentative pour construire un musée sur l’île Seguin, ancien site de l’usine Renault, dut être abandonnée après cinq années de palabres avec la commune de Boulogne-Billancourt et les riverains. En 2005, François Pinault se tourne alors vers Venise où il pourra exposer sa collection dans le Palazzo Grassi dont il s’est rendu propriétaire à 80%. Et en 2006, il remporte contre la fondation Guggenheim un concours lancé par la ville de Venise pour la création d’un centre d’Art contemporain dans l’ancien entrepôt de la Punta Dogana, édifice situé à la pointe de l’île de Dorsoduro. Sa réhabilitation et sa transformation pour y créer 5000 m2 d’expositions coûteront 20 M€. Les travaux sur les deux musées, inaugurés en 2006 et 2009, auront été confiés à l’architecte japonais Tadao Ando. 

L’appétit muséal de François Pinault est insatiable : c’est ainsi qu’après plusieurs années de discussions, une filiale d’Artémis se voit attribuer en 2016 par la mairie de Paris un bail de 50 ans pour gérer l’ancienne Bourse de Commerce. Toujours avec l’aide de son architecte préféré, Tadao Ando, l’amateur d’art la transformera en musée d’Art contemporain. Investissant 120M€ de travaux dans ce chantier, il redonne une nouvelle vie à l’édifice dont la structure en anneau si particulière fut conçue par Le Camus de Mézières en 1763 et la charpente métallique de la coupole installée par Bélanger après l’incendie de 1854 qui détruisit la première coupole dotée d’une charpente en bois comme on l’a déjà vu.

Les commentaires des médias sur cette réalisation ont été dithyrambiques lors de son inauguration en mai 2021. Que l’on soit ou non amateur d’Art contemporain, on ne peut que se féliciter du résultat d’un point de vue architectural et d’une démarche qui visait à la préservation et à l’enrichissement de notre patrimoine. 

Pourtant, il y a bien quelque chose qui cloche, et même plusieurs choses ! 

Prenons le musée d’Orsay. Résultat de la transformation d’une gare ferroviaire en un extraordinaire musée, on ne se lasse pas d’en admirer la structure, les espaces, les volumes et bien sûr les œuvres. Et nous trouvant au milieu d’une telle splendeur, nous pouvons prendre conscience que tout cela nous appartient un peu et que l’on est un peu chez soi puisque tout ce qui nous entoure fait partie de biens communs acquis grâce à nos impôts, donc à notre argent. Tant et si bien que nous sommes tous copropriétaires du musée d’Orsay comme de tous les musées nationaux et des collections qu’ils abritent. 

En revanche, si nous entrons dans le nouveau musée de la Bourse de Commerce, nous ne sommes plus chez nous, mais bien évidemment chez François Pinault qui, moyennant un droit d’entrée de 14€, nous révèle ses goûts, mais aussi le pouvoir que donne l’argent lorsqu’il se situe à un tel niveau. Voilà qui pose des questions potentiellement très clivantes sur le statut et la propriété des œuvres d’art et des musées. 

Que constate-t-on au travers des deux exemples ci-dessus, d’un côté la Bourse de Commerce et les collections de M. Pinault, de l’autre le musée d’Orsay ? Que l’art peut aussi bien avoir le statut de propriété privée que celui de bien public. Rien de très nouveau jusque-là puisque cette situation perdure depuis que les humains produisent des œuvres d’art, de la plus délicate à la plus monumentale, dans nos sociétés duales où s’affrontent dominants et dominés, exploiteurs et exploités, riches et pauvres, rufians et honnêtes gens… Faut-il pour autant accepter éternellement et sans broncher que de l’argent souvent accumulé au détriment des finances publiques, de ceux qui produisent ou de ceux qui consomment, et bien sûr de la nature, se concentre entre les mains de quelques individus, leur permettant de faire main basse sur des milliers d’œuvres d’art pendant que des conservateurs de musées nationaux doivent se débrouiller comme ils peuvent avec des budgets très contraints pour enrichir leurs collections ? Cela dit, peut-on vraiment envisager des mesures assez dissuasives ou coercitives qui pourraient empêcher les ultra-riches de s’approprier ce dont ils ont envie ? Ou faut-il simplement parvenir, en luttant contre l’évasion fiscale et par une fiscalité plus redistributive, à ce que les dotations de l’État aux musées nationaux augmentent suffisamment pour que leurs conservateurs puissent jouer dans la même cour que les milliardaires amateurs d’art au lieu de voir ces dotations en baisse tendancielle comme c’est le cas depuis 2012 ? 

Car en effet, la puissance publique est tout aussi efficace pour préserver et enrichir notre patrimoine architectural et culturel quand elle peut ou veut s’en donner les moyens :  voir le Centre Pompidou, la transformation remarquable de la gare d’Orsay, le Grand Louvre, l’Arche de la Défense, sans parler de réalisations en province telles que le musée des Confluences à Lyon, le Mucem de Marseille, le Louvre de Lens, etc. Les milliards de l’évitement fiscal que pratiquent Pinault, Arnault et leurs semblables auraient permis d’engager bien d’autres actions en faveur de la culture sous forme d’acquisitions d’œuvres, de réhabilitations d’anciens édifices ou de création de nouveaux espaces culturels, et ces ajouts à notre patrimoine auraient rejoint le bien commun de tous les Français au lieu de voir de semblables acquisitions et créations architecturales devenir la propriété exclusive de quelques oligarques !

Est-ce que je suggère ici que François Pinault n’aurait pas réussi à accumuler tant de patrimoine sans quelques entorses à la probité ? Non, je ne le suggère pas, je le constate au vu des éléments qui sont de notoriété publique et qui montrent en effet que son « flair » en tant qu’investisseur et les licenciements massifs consécutifs au rachat d’entreprises en difficulté ont été accompagnés également de la mise en place de divers procédés lui ayant permis de soustraire au fisc des milliards d’euros. Sans rappeler tous les litiges qu’il a pu avoir avec l’administration fiscale, parfois résolus par la négociation en échange du versement de centaines de millions de francs ou d’euros, intéressons-nous au seul cas de l’entreprise de luxe Gucci dont l’activité est concentrée pour l’essentiel dans des ateliers italiens.

François Pinault avait acquis, comme nous l’avions vu, 40% du capital de cette entreprise en 1999, au grand dam de Bernard Arnault. Pour Kering, maison mère de Gucci, la firme de luxe de Florence est son fer de lance et représente la plus importante source de profits. En 2017, un ancien cadre de Gucci dévoile, preuves à l’appui, un montage complexe qui permet à l’entreprise d’échapper à l’impôt en Italie. Sur la période 2011-2017, l’enquête diligentée par le fisc aboutira en 2019 à un redressement de 1,25 milliard d’euros, pénalités incluses, que Kering devra verser au trésor italien. Le montage consistait pour l’essentiel à distribuer les produits Gucci à partir d’une plateforme logistique installée en Suisse près de la frontière italienne et à déclarer ainsi le chiffre d’affaires de cette plateforme au gouvernement helvète pour des activités de production réellement menées en Italie, tout cela en vue de bénéficier bien sûr de la fiscalité beaucoup plus douce de la Suisse.

Mais pourquoi accabler plutôt le groupe de luxe créé par François Pinault que bien d’autres entreprises de cette taille puisqu’à côté des montages illicites qui peuvent parfois donner lieu à redressement ou condamnation comme on vient de le voir avec Gucci, la législation fiscale elle-même permet, grâce à sa complexité, à ceux qui ont les moyens de s’offrir des conseillers fiscalistes de haut vol d’échapper à l’impôt en toute légalité ? C’est donc à la fois un immense effort de simplification qu’il faut engager dans la législation fiscale et le renforcement des services chargés d’identifier les fraudeurs et de les poursuivre comme il se doit. 

Pour conclure sur les relations entre l’art et l’argent, certains pourront arguer que les « grands mécènes » permettent parfois au grand public de contempler les œuvres qu’ils ont acquises grâce aux prêts qu’ils font aux musées dans le cadre d’expositions temporaires. Mais que dirait-on alors s’il fallait attendre le bon vouloir de ces heureux propriétaires d’œuvres d’art pour que des millions de visiteurs aient la possibilité, quand ils en ont envie ou l’opportunité, d’admirer la Joconde de Léonard de Vinci ou les Nymphéas de Claude Monet ? Ajoutons que ces très riches amateurs, pas toujours éclairés, contribuent aussi à faire exploser les prix de l’art dans des ventes aux enchères que ne peuvent plus suivre les conservateurs des musées nationaux avec pour conséquence de pervertir la nature des œuvres d’art qui deviennent des placements financiers au lieu de rester des fruits de la créativité humaine accessibles au plus grand nombre.

**

Mais que penser de l’argent qui va au luxe ? 

Avant de m’intéresser tout particulièrement à Bernard Arnault et à La Samaritaine, j’aimerais une fois de plus citer ces vers d’Apollinaire dans 1909 (Alcools) :

« J’aimais j’aimais le peuple habile des machines

   Le luxe et la beauté ne sont que son écume » 

Tout comme pour la Bourse de Commerce, un peu d’histoire nous permettra de découvrir les origines des magasins de La Samaritaine.

Ernest Cognacq était un petit vendeur parisien de tissus qui s’était installé pour un temps sur le Pont-Neuf à l’endroit où avait été construite une pompe à eau en 1603, baptisée du nom de Samaritaine en référence à la rencontre de Jésus au puits de Jacob avec une femme de Samarie qui s’appelait Photine. La fontaine du Pont-Neuf a été détruite en 1813. Après quelques déboires avec un magasin ouvert en 1867 rue de Turbigo, Ernest Cognacq devenu camelot installe sa toute petite « boutique-parapluie » sur le plus vieux pont de Paris. A cette époque, il avait déjà rencontré Marie-Louise Jaÿ depuis une dizaine d’années, elle-même première vendeuse au Bon Marché. 

Dès 1870, ses économies lui permettent de louer et d’ouvrir un « vrai », mais encore petit magasin de 50 m2 près du Pont-Neuf, rue de la Monnaie. Il le baptisera tout naturellement La Samaritaine. Un an plus tard, il prend deux employés, puis volant de succès en succès avec l’aide appréciable de Marie-Louise Jaÿ qu’il a épousée en 1872, son chiffre d’affaires connaît une croissance exponentielle, passant de 800 000 francs en 1875 à plus d’un milliard en 1925, soit 1250 fois plus en 50 ans ! Succès fondé sur l’innovation comme celle qui permettait d’essayer les vêtements dans ses magasins. 

Entre 1905 et 1910, quatre grands magasins de style Art Nouveau seront ouverts entre la rue de Rivoli et le bord de Seine. C’est ainsi que La Samaritaine devient dans les années 1930 le plus grand magasin parisien avec ses 50 000 m2, devant le Printemps et les Galeries Lafayette, et le restera jusqu’en 1970, date à partir de laquelle il commencera son déclin. 

Il faut noter également qu’une Samaritaine de luxe ouvrira boulevard des Capucines en 1917 et que Ernest Cognacq s’intéressera à l’art comme collectionneur à partir de 1906 ; finalement, le fondateur de La Samaritaine est à quelques égards un Bernard Arnault et un François Pinault réunis, sans compter son statut de « philanthrope » au travers d’une fondation créée par le couple en 1916 et dont les activités de financement des bonnes œuvres perdurent… 

En 2001, LVMH, groupe de Bernard Arnault, devient actionnaire majoritaire de la Samaritaine pour 1,5 milliards d’euros, puis de sa totalité en 2010. Les divers magasins qui constituent La Samaritaine ont atteint en 2005 un tel niveau de vétusté que leur fermeture définitive est décidée compte tenu des sommes importantes pour leur rénovation que les actionnaires historiques ne peuvent pas apporter. On peut alors imaginer que le solde pour acquérir 100% des 70 000 m2 de l’enseigne a pu être négocié à son avantage par B. Arnault. 

Celui-ci injectera encore 750 millions d’euros pour transformer l’ancien magasin et y introduire les marques de luxe de l’empire LVMH. Mais nous verrons plus loin comment le nouvel établissement de La Samaritaine a été accueilli lors de son inauguration le 23 juin 2021.

Comment Bernard Arnault a-t-il pu acquérir autant de marques de luxe et d’où est-il parti ?

Il naît le 5 mars 1949 à Roubaix et entre à Polytechnique à 19 ans. Ses passe-temps d’adolescent – équitation, tennis, piano – sont ceux d’enfants de parents aisés : son père, Jean Léon Arnault était en effet un dirigeant d’entreprise, également diplômé d’une Grande École, l’École Centrale. Quant à sa mère, elle était fille du fondateur d’une entreprise de travaux publics, Ferret-Savinel, créée en 1926 ; elle rencontrera dans l’entreprise familiale où il travaillait comme ingénieur le futur père de Bernard Arnault. Et tout naturellement, Jean Léon Arnault se verra confier la direction de l’entreprise par son beau-père en 1950. Oui, on peut le dire : Bernard Arnault est né avec une cuillère en argent dans la bouche, mais sa grande habileté et une éthique très particulière lui permettront de profiter de cette vitesse initiale pour suivre une trajectoire rapidement ascendante qui le conduira au rang de deuxième fortune mondiale. L’AFP a même annoncé qu’il aurait été pendant un cours instant le numéro un mondial le 5 mai 2021 avec 186,3 milliards de dollars, dépassant de peu celle de Jeff Bezos, patron d’Amazon. 

Cette trajectoire continuellement ascendante donne le tournis. Comme son père, il va aussi bénéficier de son milieu familial très accueillant en intégrant l’entreprise Ferret-Savinel à sa sortie de Polytechnique en 1971. Aussitôt, le Monopoly commence, les activités BTP étant vendues pour 40MF et la société reconvertie dans la promotion immobilière sous le nom de Férinel. En 1978, il prend la tête de l’entreprise familiale. 

L’élection de François Mitterrand en 1981 le fait fuir aux États-Unis ! Bernard Arnault fait partie de ces dirigeants apatrides qui choisissent de vivre là où ils pourront faire fructifier au mieux leur argent grâce notamment à une fiscalité très favorable, ce qui n’empêchera pas qu’il soit honoré par son pays natal en recevant le titre de Grand Officier de la Légion d’Honneur. Constatant sans doute que les Soviets n’ont pas pris le pouvoir compte tenu du changement de cap libéral pris en 1983 par le gouvernement socialiste, Bernard Arnault rentre en France en 1984.

Nouveau coup de Monopoly : en 1984, avec le soutien de la banque d’affaires Lazare, il investit sa fortune, soit 90MF, dans le rachat de la Société fiduciaire et financière Agache Willot dont il devient, il va de soi, le PDG, obtenant ainsi le contrôle du groupe Boussac-Saints-Frères avec dans la corbeille : Christian Dior, Le Bon Marché, Conforama et Peaudouce, rien de moins ! Les activités textiles du groupe étaient en difficultés depuis de longues années, l’État ayant injecté près d’un milliard de francs entre 1982 et 1985 pour soutenir la filière, ce qui au passage conduira la Commission européenne à exiger le remboursement partiel de ces aides accusées de fausser la concurrence ; Bernard Arnault refusera de rembourser les 338MF demandés au motif que c’était à l’État de se rembourser à lui-même pour les sommes accordées à Boussac avant le rachat. 

Si notre futur milliardaire avait obtenu gain de cause contre le groupe textile de Maurice Biderman pour ce rachat, c’est qu’il avait promis de sauver plus d’emplois que son concurrent. Ainsi Bernard Arnault peut-il annoncer en décembre 1984 : « Le groupe Férinel a reçu l’accord de principe des pouvoirs publics… Il s’inspire des grandes lignes du programme actuellement mis en œuvre par l’équipe dirigeante : -non démantèlement et reconstitution du groupe ; – souci de poursuivre la politique de concertation sociale menée dans l’entreprise. »

            La réalité fut tout autre. Moins de trois mois après la reprise par Arnault, 3000 emplois furent sacrifiés avec la fermeture de plusieurs sites ou des réductions d’effectifs dans d’autres sites. Poursuivant les habitudes prises dès son entrée dans l’entreprise de son beau-père, Bernard Arnault va se séparer du textile revendu au groupe Prouvost et céder Conforama à son rival François Pinault, comme nous l’avions déjà noté. Quant à l’entreprise Peaudouce, elle finira par disparaître corps et biens du paysage industriel français au bénéfice du groupe suédois Mölnlycke. Des 16000 employés du Groupe Boussac Saints-Frères, il n’en restera que 8700 au lieu des 12200 qui avaient été promis. Tout cela avec un parfait cynisme, le tycoon, peu enclin au dialogue et à la concertation, ne montrant aucun scrupule à mettre sur le carreau des milliers d’employés pour restructurer son groupe autour des produits de luxe, notamment la haute couture et les parfums avec Dior. Tant et si bien qu’avec un investissement de quelques dizaines de millions de francs, le groupe Boussac verra sa cote trois ans plus tard, en 1987, s’élever à 8 milliards de francs ! Mais à quel prix humain ce formidable coup de Monopoly a-t-il pu se réaliser ?

            Voilà donc Bernard Arnault assez riche pour prendre des participations à hauteur de 25% dans les groupes de luxe Louis Vuitton et Moët-Hennessy qui fusionnent en 1987 sous le sigle LVMH. La corbeille comporte maintenant six grandes marques champenoises, cinq chez Moët-Hennessy et une chez Louis Vuitton, le cognac Hennessy ou encore les sacs et bagages Vuitton. Bernard Arnault profitera des désaccords sur la stratégie de développement entre les deux patrons de LVMH pour lancer une OPA en 1988 ; il devient actionnaire majoritaire et est nommé président du directoire en janvier 1989. Il n’a que 39 ans. LVMH va alors connaître une progression foudroyante : valeur boursière multipliée par quinze, progression du chiffre d’affaires et des bénéfices de 500 % en 11 ans. 

            Les années 90 verront LVMH se développer tous azimuts. Il serait fastidieux ici d’énumérer toutes les acquisitions du groupe. Soulignons seulement le fait qu’elles ne se limitent pas aux marques de luxe – Kenzo, Beluti, Guerlain, etc. – mais s’étendent aussi à la presse – La Tribune, Les Échos – à des vignobles classés – Château d’Yquem, Sauternes – ou encore à l’art avec l’acquisition de Phillips, numéro trois mondial de la vente aux enchères. 

            A la fin de la décennie, le milliardaire qui voit de plus en plus haut, fait construire à son architecte préféré Christian de Portzamparc la LVMH Tower à New-York pour y regrouper toutes ses activités. Hillary Clinton sera invitée à son inauguration le 8 décembre 1999. 

            Le parcours des milliardaires est d’une grande monotonie : on achète, on revend avec de gros profits, on achète à nouveau, mais plus gros, plus grand, plus profitable encore et ainsi de suite. Précepte archi connu et généralement vérifié : l’argent appelle l’argent. Et surtout, ne pas avoir d’interdits : une fois de plus, Bernard Arnault négocie en 2001 avec son concurrent direct, François Pinault, en revendant les titres de LVMH dans Gucci pour la modique somme de 2,13 milliards d’euros. Puis il entre au capital de Carrefour en 2007. Comme s’il fallait encore renforcer son image caricaturale de milliardaire, il prend possession en 2008 d’un constructeur de yachts de luxe, Princess Yachts. Et l’accumulation se poursuit avec l’acquisition en 2011 de Bulgari, marque italienne de luxe spécialisée dans l’orfèvrerie, l’horlogerie et les parfums. En 2013, ce sera Loro Piana, encore une entreprise italienne, mais spécialisée cette fois dans les tissus et vêtements de luxe en cachemire et laine. 

            Il arrive pourtant que la monotonie du développement sans limites des bonnes affaires vienne à être perturbée par quelques couacs ! De ce point de vue, l’année 2012 va constituer pour Bernard Arnault et pour les médias une période embarrassante pour l’un et vendeuse pour les autres. Son premier faux-pas est une tentative d’acquérir la nationalité belge qui sera stigmatisée par Libération dans sa une du 10 septembre 2012 avec ce titre parodiant les paroles d’un ancien Président de la République « Casse-toi riche con ! ». Bernard Arnault a-t-il voulu faire bénéficier ses héritiers de droits de succession avantageux en transférant la plupart des actifs du Groupe Arnault en Belgique et en demandant la nationalité de ce pays ? Quel était le rôle de cette fondation de droit privé belge Protectinvest créée en 2008 et présidée par Thierry Breton (extrême porosité entre le monde politique et les affaires : Thierry Breton fut ministre de l’Économie de 2005 à 2007 et est depuis 2019 Commissaire européen) ? Quoi qu’il en soi, n’est-il pas étrange que Bernard Arnault soit, après sa fuite aux États-Unis en 1981, à nouveau tenté par la fuite dans un pays étranger au moment où un Président « socialiste » s’installe à l’Élysée ? Aurait-il cru un instant le mensonge de François Hollande déclarant au Bourget en janvier 2012 que son ennemi était la finance ? Devant la bronca suscitée par cette affaire de nationalité belge et constatant peut-être avec soulagement que la déclaration du Bourget était simplement une comédie de Hollande pour gagner des voix à gauche, Bernard Arnault retire sa demande en avril 2013. 

            Puis viendra en 2016 le fameux « Merci Patron ! » de François Ruffin, un film documentaire qui dénonce la gestion antisociale de Bernard Arnault avec suppression d’emplois et délocalisations d’entreprises dans des pays à bas salaires, que ce soit en Europe ou en Asie. Ce film soulignera en même temps la collusion entre le monde politique et celui des affaires avec le rôle joué par l’ancien chef de la DCRI sous Sarkozy, Bernard Squarcini, au profit de LVMH. Celui-ci continuera après son départ de la DCRI à faire appel aux services de cette administration pour assister sa société dans la surveillance de François Ruffin et de son journal Fakir à la demande de la multinationale du luxe, l’objectif officiel des activités de Squarcini étant la lutte anti-contrefaçons. 

            Dites-moi qui sont vos amis, je vous dirai qui vous êtes : le 17 octobre 2019, Bernard Arnault inaugure un nouvel atelier Louis Vuitton à Keene, au Texas. Après Hillary Clinton à New-York, ce sera donc Donald Trump à Keene. Il faut veiller à avoir de bons rapports aussi bien avec les Républicains qu’avec les Démocrates, n’est-ce pas ?  Bernard Arnault arrivera à bord d’Air Force One, l’avion qui emmenait Donald Trump, sa fille Ivanka et toute la suite présidentielle au Texas. Parmi les photos de cette inauguration au sommet, l’une d’elle m’a parue symbolique : on y voit à droite de la photo les représentants du monde des dominants, Trump, Arnault père et fils, Michael Burke qui dirige Vuitton et Ivanka Trump, mince, élégante et perchée sur ses talons aiguilles, tandis qu’à gauche de la photo leur font face deux ouvrières en blouse, dont l’une affiche un embonpoint avancé, chaussées de simples ballerines noires et qui écoutent docilement les paroles de Trump. En somme, une sorte de caricature sur le thème « dominants-dominés », dans laquelle on aurait plaqué les photos de vrais personnages sur un dessin humoristique. La photo illustre aussi parfaitement la complicité qui peut unir le monde des affaires aux dirigeants politiques les plus réactionnaires : pour les milliardaires, la politique n’a pas d’odeur. D’ailleurs, c’est la même chose en France : comme on le verra ci-après, tout en étant l’un des invités de Sarkozy au Fouquet’s en 2012, Bernard Arnault invitera en 2014 Hollande à l’inauguration du nouveau musée de la Fondation Louis-Vuitton. 

            Car en effet, l’art est un registre où Arnault cherchera, comme François Pinault, à laisser un héritage pour la postérité, une véritable obsession pour ces milliardaires qui veulent « à tout prix » s’élever au-dessus de leur univers où règne l’argent-roi en faisant réaliser des œuvres architecturales par des sommités mondiales puisqu’ils ne savent eux-mêmes créer autre chose que de l’argent. Ainsi de cette Fondation Louis-Vuitton construite dans le Jardin d’Acclimatation, au grand dam de certains riverains du bois de Boulogne dont le recours contre ce projet le retardera de plusieurs années : lancé en 2006, il n’aboutira qu’en 2014, inauguré en présence de François Hollande. Ce nouveau musée accueille bien sûr des collections de la fondation constituées d’œuvres d’artistes contemporains, car tout comme ses pairs, Bernard Arnault est lui aussi un oxymore vivant : milliardaire-philanthrope ! Enfin, mécène ! Car en effet, LVMH apporte son soutien tant à des expositions qu’à de jeunes créateurs. 

            Sa « philanthropie » au sens strict du terme, donc son amour de l’humanité, Arnault a voulu en apporter la preuve aux débuts de la pandémie Covid 19 en fournissant gratuitement du gel hydro-alcoolique produits par les différentes unités de LVMH spécialisées dans les parfums. Il utilisera également son réseau mondial pour obtenir d’un fabricant chinois qu’il fournisse des millions de masques, LVMH prenant à sa charge le coût de la première semaine de production à hauteur de 5M€. C’est mieux que rien, mais aussi une bien maigre compensation des désordres provoqués par la mondialisation de l’économie et dont Bernard Arnault est un acteur de premier plan. 

            Et naturellement, il fera partie des « généreux donateurs » qui ont proposé des centaines de millions d’euros pour la reconstruction de Notre-Dame de Paris : 200 M€ en ce qui le concerne. Chiffre à comparer aux économies d’impôts que son groupe à réalisées : rien qu’avec le mécénat et la Fondation Louis-Vuitton, la Cour des Comptes estimait en 2018 que LVMH avait réduit ses impôts de plus d’un demi-milliard d’euros entre 2007 et 2017. Mais l’optimisation fiscale du groupe de luxe ne s’arrête pas à cette fondation : ainsi le journal Le Monde a-t-il révélé en 2017 l’implication de Bernard Arnault dans l’affaire des Paradise Papers. Le milliardaire aurait placé ou acquis des biens personnels de grande valeur dans des paradis fiscaux – villas, yachts, etc. – pour échapper notamment à l’ISF. Le journal a été « puni » en se voyant retirées des annonces publicitaires des entreprises de LVMH, privant ce quotidien de 600 000€ de recettes. Est-ce que des actionnaires du journal comme Xavier Niel ou Mathieu Pigasse ont protesté contre cette mauvaise manière auprès de leur collègue milliardaire ?

            Mais cessons d’accabler ce pauvre Bernard Arnault et venons-en à sa dernière œuvre : La Samaritaine reconvertie en super magasin de luxe avec la complicité active de la mairie de Paris, à commencer par la maire en personne. Au Bonheur des Riches aurait pu être le nouveau nom de ce vénérable grand magasin où l’on trouvait jadis de tout ! Inauguré le 21 juin 2021 après des années de travaux pour sa transformation et sa réhabilitation, le bâtiment principal Art Déco a de l’allure aussi bien à l’extérieur qu’à l’intérieur avec ce grand hall où s’enroulent sur cinq niveaux les volées de marches et les balcons avec leurs gardes corps Art Nouveau où se dessinent les motifs d’une élégante ferronnerie d’art. Naturellement, à l’instar de la Bourse de Commerce rénovée, la beauté du lieu tient d’abord à la créativité des architectes qui avaient conçu les plans de cet immeuble au début du siècle dernier ; en ce début de XXIème siècle, les entreprises retenues par Bernard Arnault ont donc fait du neuf avec de l’ancien au prix d’un investissement de 750M€. 

            Une fois de plus, Bernard Arnault n’a pas fait une inauguration à la petite semaine : outre la maire de Paris, Anne Hidalgo, il a invité le couple Macron. Le Président de la République a pu ainsi s’offrir à son arrivée une « standing ovation » (mais personne n’ayant de siège, tout le monde était forcément debout !) de la part des personnels du nouveau magasin accoudés aux balcons des différents niveaux. Question : que les personnels soient heureux d’avoir un emploi dans un tel lieu est compréhensible, au moins pour ceux qui sont sensibles à la belle architecture, mais quelles pouvaient bien être les raisons qui les ont fait applaudir Macron ? A moins que les applaudissements aient visé le seul Bernard Arnault, allez savoir ?

            Car certains ont pu juger indécente une telle débauche de luxe en cette période où jamais autant de nos jeunes ont été contraints d’avoir recours aux banques alimentaires, où tant de familles n’ont plus les moyens de régler leurs notes de gaz et d’électricité, où quelque dix millions de nos concitoyens vivent au-dessous du seuil de pauvreté, où l’hôpital public est à l’agonie, où les services publics abandonnent des pans entiers de certains territoires, sans oublier le manque de ressources pour investir massivement dans une véritable transition écologique. Parmi ceux qui se révoltent contre tant d’arrogance des plus riches d’entre nous, citons ATTAC, association qui lutte notamment contre l’évasion fiscale ou contre les accords de libre-échange donnant la primauté au droit commercial sur les droits humains, du travail, sociaux et environnementaux. Raisons qui ont conduit les militants d’ATTAC à une action largement médiatisée au cours de laquelle ils ont recouvert les vitrines de la nouvelle Samaritaine de peinture noire.  

            Mais quelle ne fut pas la réaction des médias bien-pensants et des représentants de la très libre entreprise à ce que Madame Hidalgo appelle acte de « vandalisme » ! Pensez-donc, de la gouache noire qui ne peut se retirer qu’avec de l’eau ! Oser salir un si bel ouvrage et son propriétaire, grand créateur d’emplois et grand contributeur à la diminution de notre déficit commercial abyssal de 44 milliards d’euros en 2020 ! Honte sur ATTAC et ses soutiens !

            Naturellement, les 62 milliards ajoutés à la fortune de Bernard Arnault en 2020 en pleine pandémie et les dividendes records versés aux actionnaires de LVMH, voilà qui est bien normal ! De même qu’il n’y a rien à redire aux 31 sociétés offshores que possède le milliardaire au seul Luxembourg, et 26 pour LVMH…   

Pour conclure sur la promotion des produits de luxe et sur Bernard Arnault en particulier, nous pouvons commencer par remarquer que l’inauguration de la nouvelle Samaritaine tombe au plus mauvais moment alors que les plus défavorisés paient le plus lourd tribut à la pandémie covidienne et que les plus riches ont accumulé des profits sans précédents en 2020. Dans ces circonstances, n’aurait-il pas fallu par décence jouer profil très bas avec une cérémonie d’ouverture a minima en évitant d’inviter le couple Macron et d’hyper médiatiser l’évènement ?  

Las ! l’idée même de décence n’effleure pas les milliardaires ; les affaires avant tout. Et même si les touristes japonais, chinois ou étatsuniens se font encore rares, il ne faut pas pour autant oublier d’informer largement les riches clients français et européens de l’ouverture de ce grand magasin de luxe.

Quant à l’idée que cette promotion du luxe ostentatoire est une incitation à consommer au détriment des ressources de la planète toujours plus de produits trop souvent fabriqués au mépris des droits humains, voilà qui laisse également de marbre nos milliardaires. 

Mais objectera-t-on du côté de la mairie de Paris, le projet comporte également la construction d’une crèche et de 96 logements sociaux. Remarquons alors que ces logements sociaux loués à un prix défiant toute concurrence dans Paris intramuros sont réservés principalement à la mairie et à la Préfecture de Police, et surtout, que l’investissement correspondant, pour n’être pas négligeable avec ses 23,7M€ ,ne représente qu’à peine plus de 3% du total des 750M€, la part du lion revenant au nouveau magasin de luxe et au Cheval Blanc de la Samaritaine qui s’ajoute à la chaîne d’hôtels haut de gamme propriété de LVMH.  

Bonne lecture

Bertrand

Sources pour cet article : principalement Wikipédia, mais aussi Libé, le journal Fakir, Business Insider, le site de LVMH, Actu Paris et quelques autres.           

Nouvelles d’un ami de la nature qui vit dans un pays qui la détruit

Nouvelles d’un ami de la nature qui vit dans un pays qui la détruit

            Jeff vit à 8000km de la France, à Vancouver en Colombie Britannique. Son engagement personnel dans la défense de l’environnement est admirable lorsque l’on pense à ce qu’est la politique du Canada dans ce domaine, et plus généralement à l’absence de conscience environnementale de l’écrasante majorité des citoyens de cet immense pays qui se classait en 2017 au quatrième rang des pays les plus émetteurs de CO2 par habitant derrière le Qatar, le Koweït et l’Arabie Saoudite, mais devant les États-Unis.

            Le texte qu’il m’a adressé en français au début de la COP 26 est d’autant plus touchant que Jeff ne maîtrise pas très bien notre langue et qu’il a dû s’aider d’un traducteur de langue en ligne. Avec sa permission, j’ai donc apporté les seules corrections nécessaires à la parfaite compréhension de son texte sans toucher au reste. Son ressenti de la situation du monde m’a paru intéressant et son action exemplaire ; un témoignage qui nous dit que si la situation est grave, elle ne sera pas désespérée tant qu’il y aura des Jeff de par le vaste monde ! 

Cher Bertrand,

Salutations des forêts de la côte ouest du Canada !! 

Les mois qui se sont écoulés depuis la dernière fois que je t’ai écrit ont été occupés par les problèmes liés à la Covid 19 – de nouveaux drames humains, de nouvelles découvertes et des bouleversements dans les routines, les amitiés et les constructions sociales. Ces changements ont remis en cause les opinions, les besoins, voire les idéologies – et soulèvent également de nouvelles questions. Celles de la Covid et de la santé en général touchent de plus en plus les questions climatiques et environnementales. 

J’ai l’impression que cela fait des années que je ne t’ai pas écrit, tellement de choses ont changé dans le monde en seulement neuf mois : contraintes personnelles, Covid et restrictions sanitaires, médias de moins en moins dignes de confiance et bien d’autres sujets sur lesquels il faudrait écrire. Trump a montré que quelques dirigeants peuvent mettre en péril la nécessité partagée de renforcer nos accords et de modifier nos comportements sur le climat.

J’ai appris l’importance non seulement du dialogue, mais aussi du processus de changement de comportement de mes voisins et de ma communauté. Pour moi, j’ai trouvé que la plupart de nos succès aidaient les gouvernements locaux et les individus à changer leurs habitudes, plutôt que les grandes entreprises ou les gouvernements nationaux. Beaucoup de gens, ici, apprécient les véhicules « tout-terrain » – s’embourbant dans des zones humides et ignorant comment cela les détruit ainsi que l’habitat des oiseaux et des animaux. Éduquer les gouvernements locaux sur la façon de sauvegarder et de restaurer leurs cours d’eau était un bon début. Lorsque les propriétaires de chiens les « promènent » dans des bassins hydrographiques, comme les zones boisées autour de Vancouver, ils propagent le fongus chytride d’une zone riveraine à l’autre, ce champignon aquatique pathogène décimant certains amphibiens qui pourraient ne jamais revenir. Les personnes sans éducation et réfractaires au changement n’abandonneront pas leurs privilèges. Les clôtures pour protéger les zones sensibles étaient souvent arrachées – les panneaux demandant de réparer les dégâts faits par les chiens et de rester en dehors des zones humides étaient défigurés et transpercés de balles. Cet exemple s’extrapole à la santé et aux habitats de nombreuses espèces.

Garder mes mains dans le sol avec des projets de jardinage communautaire et d’agriculture urbaine m’a aidé à rester en contact avec la nature ces dernières années, lorsque mon corps ne me permettait pas une participation plus vigoureuse. Après quelques années d’absence des travaux de restauration, je vais réfléchir à la manière dont je pourrais maintenant reprendre ce travail. Peut-être que ma propre histoire de participation à petite échelle à la restauration naturelle et au dialogue sur le climat peut en inspirer d’autres.

Au lieu de simplement progresser, le changement climatique, comme le cancer, s’est métastasé partout dans le monde – et au Canada, peut-être plus que partout ailleurs sur terre. Ici, sur la côte ouest de l’Amérique du Nord, nous avons connu l’été le plus sec, le plus chaud et le plus destructeur de l’histoire. Lytton, en Colombie Britannique, a atteint un nouveau sommet – près de 50º C. Pas seulement le plus chaud, mais plus de 30 % plus chaud que jamais ! Une semaine plus tard, toute la ville a brûlé. Plusieurs centaines de personnes sont mortes ici pendant cette vague de chaleur – au pays de la forêt humide ! Les terres et les eaux ont déjà perdu des écosystèmes millénaires et l’extinction des espèces se poursuit à un rythme accéléré. Personnellement, j’ai vécu une enfance avec plein de grenouilles et de tritons, de forêts anciennes et de zones humides naturelles en gestation depuis des milliers d’années et qui ont été détruites par l’homme et le feu –peut-être pour toujours. Cet anéantissement trouble profondément mon cœur et mon âme. Beaucoup de générations plus récentes ne verront jamais une salamandre, ne verront jamais un hibou voler ; ou l’expérience joyeuse d’un hiver enneigé, ou le spectacle grandiose des glaciers qu’ont pu admirer mes ancêtres norvégiens.

Je fais tout ce à quoi je peux penser à mon modeste niveau – composter, recycler les plastiques « mous », ce qui semble être un geste de grande importance quand on voit les tourbillons océaniques de ces plastiques. J’ai apporté mon aide au saumon rose dans les écloseries et au repeuplement des rivières locales, à la replantation indigène dans les zones humides alpines, ai créé deux groupes environnementaux à l’échelle locale, organisé des initiatives de repeuplement du hareng et encouragé la plantation d’arbres en milieu urbain. Je sais que mes propres actions ne peuvent pas suffire et je ne peux qu’encourager des actions plus importantes à l’échelle mondiale.

J’écris sur le changement climatique pour deux raisons. Premièrement, ce dialogue, même en y contribuant à ma petite échelle, est un élément pour provoquer le changement. Deuxièmement, j’ai passé du temps à établir un consensus dans les communautés pour modifier les comportements. Sans changement de comportement individuel, le changement de comportement communautaire n’est pas possible. Nous sommes confrontés à des obstacles au changement – qui ne se concentrent pas seulement sur ce que nous avons perdu et risquons bientôt de perdre, mais nous devons également partager la conscience de la beauté naturelle du milieu qui nous entoure. J’ai d’abord dû apprendre les meilleures pratiques en matière de zones humides, le comportement des forêts et des cours d’eau – avant de planifier avec la communauté pour préserver ce que nous avons et d’enseigner aux voisins (et aux enfants, vêtu de mon costume de grenouille stupide) la biodiversité, le repeuplement du poisson dans les cours d’eau et la réhabilitation des milieux urbains. C’est un cycle : apprendre, préserver, puis enseigner. Peut-être que ces écoliers et voisins, avec un plus grand respect pour la terre qui nous entoure, apprendront, agiront et enseigneront aux autres à leur manière.

C’est la « prochaine, dernière et meilleure chance pour la survie de l’humanité », disent certains de la COP26 en Écosse. Pour ceux d’entre nous qui sont en dehors de ces discussions, cela nous laisse très circonspect. Je regarde les mises à jour par e-mail de la COP26, les nouveaux objectifs de carbone à l’échelle européenne fixés la semaine dernière, tandis que d’autres régions (Chine, Australie et al), brûlent plus de charbon que jamais. 

As-tu l’espoir que l’homme puisse changer ses comportements à temps ? Que peux-tu suggérer à ces « scientifiques citoyens » ? Tu as déjà écrit bien des choses intéressantes, et j’espère que ce qui sortira de la COP26 dans les semaines à venir ne va pas nous décevoir une fois de plus.

Que peut-on faire pour rapprocher les peuples ? Je me tourne de plus en plus vers Camus – les romans, bien sûr, mais aussi sa conférence de 1946, « La crise humaine ». Mes amis et moi avons hâte de voyager et de visiter nos lieux européens préférés. Devrions-nous réduire nos rêves et oublier le tourisme de notre vivant ? Questions difficiles à aborder une autre fois. Pour l’instant, simplement « merci » pour ton travail de réflexion pour aller vers un monde meilleur.

Amicalement

Jeff

Piqûre de rappel

Piqûre de rappel

Non, ce n’est pas la troisième dose, mais seulement pour vous rappeler que j’anime une lecture-débat ce samedi 20 novembre entre 15H00 et 17H00 à la bibliothèque Jacqueline de Romilly de Crosne (6 rue de Schötten). Les sujets abordés correspondront à un choix de chroniques parues en décembre dernier dans « AUTOUR D’UN LIVRE Bienvenue chez Némésis » et seront tous liés aux grands thèmes qui font … débat dans nos sociétés consuméristes, inégalitaires, délétères pour l’environnement, etc. etc. à l’exception notable de l’immigration! Un moment intense à vivre entre personnes curieuses de mieux comprendre le monde dans lequel nous vivons ou survivons.


Bertrand

Après Dourdan

Après Dourdan

Il y a trop longtemps que je ne me suis pas exprimé sur ce blog, en particulier sur mes « rencontres ». Elles ont été, il est vrai, plutôt rares au cours des deux années passées. Pourtant elles ont un peu repris depuis six mois comme vous l’avez constaté avec les annonces que j’ai faites sur ce blog, mais je n’avais jusqu’alors rien perçu de nouveau par rapport à ce que j’ai pu relater en 2018 et 2019 de mon ressenti à l’égard des visiteurs de salons ou clients de librairies qui avaient la bonne grâce de faire un arrêt devant ma table et mes livres. En revanche, je ne me souviens pas avoir été à ce point déconcerté par certains visiteurs de ce salon, et ce, de deux manières.

Premièrement, par les réactions très positives de certains aux propos que je leur tenais pour présenter mes deux livres, du genre « Je suis bien d’accord avec vous » ou « C’est très intéressant ». Mais au bout du compte, je n’avais droit qu’à des remerciements. Alors, que penser ? Si vous estimez devant un auteur que son livre doit être très intéressant mais ne l’achetez pas, quels sont donc les critères à satisfaire pour que vous l’achetiez ? De même, si vous savez d’avance que vous n’achèterez pas l’un ou l’autre des livres qui sont devant vous, pourquoi laisser l’auteur s’épuiser à tenter de vous démontrer qu’il serait utile et important de les lire ? J’ai parfois eu l’impression que mes interlocuteurs s’emparaient de mes réflexions ou des informations que je leur apportais et estimaient au bout d’un certain temps que c’était déjà pas mal de pris sans avoir eu à débourser un euro, en tout cas que c’était suffisant pour évoquer le lendemain avec l’entourage les idées nouvelles que leur a apportées la rencontre avec cet auteur.

Deuxièmement, par ce genre de quidam passant au large de votre table et que vous essayez d’attirer en lui demandant s’il veut bien consacrer une minute ou deux aux livres qui sont présentés. Et le quidam de se retourner à peine en déclarant que mes livres ne l’intéressaient pas du tout et qu’il ne les lirait jamais, comme s’il en avait de manière quasi instantanée saisi la teneur sans les avoir regardés une seconde ! 

Alors je voudrais dire à ces visiteurs que tout auteur, quel que soit le genre littéraire auquel il consacre son temps, mérite un minimum de respect. De grâce, ne laissez pas un auteur s’engager dans un long exposé pour démontrer la valeur d’un ouvrage qu’il a écrit, sachant d’avance que vous n’avez aucune intention de le lire. Et si l’ayant ainsi laissé parler, vous acquiescez à ce qu’il a dit et vous affirmez votre intérêt pour les thèmes évoqués, alors il vous faut inventer une solide raison pour repartir les mains vides, et non vous contenter d’un « merci » ou « bon courage » qui laisse l’auteur sans voix, au sens propre comme au sens figuré ! Quant à ceux qui osent marquer ostensiblement leur dédain pour un auteur et ses livres, qu’ils s’abstiennent tout simplement de fréquenter ces lieux que sont les salons littéraires où se doivent de régner courtoisie et ouverture d’esprit. 

Et comme il ne faut pas seulement déplorer ce qui nous paraît insupportable, je dois saluer ce lecteur qui, m’ayant acheté samedi NEMESIS, est revenu dimanche pour m’annoncer avec joie qu’il avait commencé à lire le livre par les deux bouts, le préambule et la conclusion, ce qui n’est pas bien, a-t-il reconnu, mais que ce début de lecture qui passe par la fin l’avait définitivement encouragé à lire tout le reste !

J’en profite pour saluer les organisateurs de ce salon et dire mon appréciation du confort dans lequel les auteurs étaient installés. En revanche, la question se pose de la pertinence de le programmer sur deux jours. Pendant de longues heures, le nombre d’auteurs présents aura dépassé le nombre de visiteurs ! Le sentiment de tout ce temps passé pour rien ou presque semblait partagé par mes collègues. Les organisateurs ne devraient-ils pas envisager de limiter ce salon à un seul jour, par exemple le dimanche ? 

Bertrand 

Tous à Dourdan

Tous à Dourdan

Bonjour à toutes et à tous,

Comme vous le savez peut-être, le Salon des Livres et des Auteurs se tient à partir de demain samedi 13 novembre et pour le week-end entier à Dourdan, Essonne, salle des fêtes, rue d’Orsonville.

Le public sera accueilli samedi de 11H00 à 18H00 et dimanche de 10H00 à 18H00. L’entrée est gratuite.

Venez découvrir les ouvrages de quelque 75 auteurs, et tout particulièrement l’essai de 412 pages NEMESIS Remettons le monde à l’endroit, ainsi que son avatar inattendu AUTOUR D‘UN LIVRE Bienvenue chez Némésis!

La lecture de ces livres sera plus que jamais d’une très grande utilité dans la période où nous entrons. Une meilleure compréhension du monde dans lequel nous vivons est indispensable pour savoir quelles sont les bonnes et les mauvaises solutions qui nous seront proposées dans les prochains mois!

A très bientôt!

Bertrand